La chanteuse et guitariste Emilie Marsh nous promet un road trip imaginaire et amoureux avec son 2ème album Nevada, attendu avant la fin de cette année. Elle nous a accordé un entretien autour de ce nouveau projet prometteur.

Comment vous parler de cette formidable artiste aux multiples facettes qu’est Émilie Marsh ? Originaire de La Rochelle, Emilie est d’abord la guitariste et arrangeuse de l’égérie des seventies la chanteuse Dani, la même avec qui on la retrouve en duo sur son dernier album éponyme sorti il y a deux ans. Elle créée son propre label indépendant Fraca!!! avec deux copines artistes en 2018 et cumule les premières parties d’artistes connus comme la Grande Sophie, Alain Souchon ou Michel Jonasz, couplé à son passage sur la scène des prestigieux festivals comme les FrancoFolies de La Rochelle ou encore le Printemps de Bourges.

De l’aveu même de l’artiste, son dernier album éponyme riche de dix titres intenses, est celui dans lequel elle a trouvé le parfait équilibre entre pop et rock. Cette diplômée d’une licence de lettres modernes à La Sorbonne, dont la voix douce contraste avec les guitares électriques, s’est confiée à nous au cours d’une interview sans langue de bois.

(c): Eva Abouahi
(c): Eva Abouahi

Nous allons commencer par la traditionnelle question en ce moment pour tous les artistes. Comment ça va en cette période très compliquée pour vous ?

C’est extrêmemnt dur pour la plupart des artistes, j’estime que j’ai de la chance, même si j’ai hâte que les concerts reprennent, que la vie puisse reprendre comme tout le monde. Mais pour moi c’est une période assez spéciale. Une période très créative puisque j’ai commencé à construire tout l’univers du prochain album. Donc c’est vrai que je me suis servi de ce moment où je ne pouvais pas bouger, pour me concentrer sur le prochain disque et m’évader autrement.

Qui est ton public ?

Je ne saurais pas définir, je sais qu’il y a beaucoup de gens fidèles qui me suivent depuis longtemps, Mais il n’y a pas une typologie particulière de personnes, je ne crois pas… Il n’y a pas d’âge particulier, c’est un peu toutes les générations, mais c’est vrai que j’ai des liens assez fort avec des gens de mon public. Des gens supers voilà (rire) ça résume bien!

Tu es seule sur scène, avec une vraie présence musicale. A quel âge as-tu commencé la scène ?

J’ai commencé au lycée ce qui nous ramène aux années 2003/2004. J’avais un groupe et on faisait les bals, on faisait le 14 juillet et c’était vraiment mon premier groupe avec lequel j’ai tourné. Je crois que j’ai commencé ce groupe quand j’avais 15 ans … Après j’ai fait des cours de guitare, de piano mais j’ai vraiment commencé à jouer et me produire sur scène à 15 ans en 2002/2003.

La musique et l’écriture sont elles arrivées au même moment ?

En fait j’ai toujours vraiment aimé écrire. Depuis toute petite j’écrivais des histoires. D’ailleurs au départ je voulais être écrivain, après j’ai appris la musique, et un jour j’ai compris qu’on pouvait réunir les deux. Quand j’ai compris qu’on pouvait en faire un seul élément, un petit moment de trois minutes avec texte et musique, je me suis dit : « C’est exactement comme ça que je veux m’exprimer » donc c’est venu assez tôt quand j’avais une quinzaine d’années, ado quoi. Vraiment ça réunissait tout ce que j’aimais donc c’était parfait je me suis dit : « c’est ça que je veux faire »

Tu avais aussi remporté un concours de poésie

Oui justement à cette période là j’avais une quinzaine d’années. C’est là que j’ai rencontré un musicien avec qui j’ai bossé pendant très longtemps Étienne CHAMPOLLION, qui a aussi gagné ce concours et après on a commencé à faire de la musique tous les deux et cela a duré de nombreuses années !

Tu es « multi tâches » guitariste, arrangeuse, compositrice, auteure pour toi et d’autres artistes ainsi qu’interprète. Y-a-t’il un rôle qui a le plus d’importance pour toi ?

Artistiquement en tout cas… ah c’est difficile… J’adore jouer les morceaux sur scène, donc le côté performeuse, chanteuse, guitariste qui vont ensemble, ça j’aime beaucoup. Ce moment-là où j’incarne mes chansons sur scène, il y a ça et le moment aussi où on écrit une chanson, c’est assez magique. Ces deux aspects là je les aime autant..

Tu as également monté ton propre label en collaboration avec deux autres amies artistes. Beaucoup d’artistes en arrivent là. Pourquoi ? est ce pour une question d’indépendance ?

Il y a plusieurs choses qui se rejoignent. À la base, notre label on l’a créé parce qu’on était trois artistes amies qui collaborions ensemble et on avait toutes monté nos structures indépendantes. Donc on était déjà trois indés, on avait déjà nos fonctionnements propres et on se donnait déjà pas mal de coups de mains et un jour on a décidé d’unir un peu nos forces. Pour créer vraiment une structure à travers laquelle on pourrait sortir nos albums. Mutualiser nos outils et nos compétences pour pouvoir faire ça. Et après pour pouvoir sortir des albums d’autres personnes, on l’a fait deux fois déjà et on continuera à le faire. Dans un autre volet de notre activité, on est souvent appelée pour intervenir dans le cadre de conférences ou workshop sur la place des femmes dans la musique. Parce qu’on est trois femmes, trois artistes, trois productrices engagées et militantes. Donc Fraca !!! (label) c’est aussi une structure qui véhicule ce message là.

Ton premier album, porte ton nom. Mais y a t’il une chanson dessus qui te ressemble plus que les autres ou qui te tient plus à cœur ?

Qui me ressemble le plus ce serait « j’embrasse le premier soir », mais qui me tient le plus à cœur j’ai une vraie affection pour la chanson « haut le cœur », parce qu’elle était dans le film Une belle histoire. « Nos vies formidables » c’était la bande originale et dans le film où j’ai eu un petit rôle. Ça a été une aventure incroyable avec ce film. Donc c’est vrai que cette chanson elle me rappelle tous ces moments-là du film, où j’ai joué la chanson, on l’a gardé, elle a vraiment beaucoup de choses à l’intérieur.

Quel est ton processus créatif ? Tu commences par la musique ? Comment procèdes-tu ?

Il n’y a pas vraiment de règle pour ça, cela dépend des chansons. C’est quand même un truc qui va ensemble. Souvent c’est la musique qui me vient, une mélodie, un truc que je vais enregistrer sur mon téléphone quand je marche dans la rue, ou alors je fais un truc de guitare, mais souvent une mélodie et rapidement il y a des mots qui s’accrochent à cela, et ça raconte ensuite une histoire. En tout cas il y a un processus, peut-être enclenché par la musicalité, ou des mots une rythmique d’un phrasé, mais je pars souvent de la rythmique ou de la mélodie ça dépend…

Quels sont les artistes qui ont bercés ton enfance ? On écoutait quoi chez toi quand tu étais petite ?

En fait j’ai un peu la double culture anglaise/française puisque j’ai un papa anglais et ma maman est française, c’est vrai qu’il y avait une dimension chanson française. Ça écoutait chez moi beaucoup Souchon, Maxime Le Forestier, Anne Sylvestre. Mon père écoutait aussi beaucoup BREL, et puis le versant anglophone, beaucoup les Beatles. Mon père c’est un chanteur aussi, il a plusieurs groupes dans lesquels il chante, il écoutait aussi les Pink Floyd, the Who, Kim CRIMSON… Donc c’est vrai qu’il y a un peu ce mélange entre les deux, d’où peut-être le goût que j’ai pour les textes et aussi pour le côté pop et musical anglophones, la façon d’écrire les mélodies c’est peut-être quelque chose que j’ai gardé inconsciemment.

Tu es bilingue du coup ?

Non je suis pas bilingue, pas complètement. C’est pour ça d’ailleurs que je n’écris pas en anglais. Sinon je pourrais aussi écrire en anglais, mais c’est pas du tout pour moi la même aisance qu’en français. Je préfère vraiment écrire dans la langue que je maîtrise.

Est-ce que la musique qu’écoutaient tes parents a joué sur tes propres compositions ?

Oui forcément je pense que ce que l’on écoute ça influe d’une manière ou d’une autre sur nous. Quand il y a une chanson qu’on adore on a forcément envie de retrouver ce type d’univers, ce type d’arrangement, ou ce type de musicalité. Oui je pense que ça influe toujours, après je pense qu’on est le produit de plein de cultures différentes, il y a plein de choses qui nous frappent à un moment dans notre vie et après ce qui ressort on ne sait pas d’où ça vient exactement. Mais après dans un exemple très concret, le travail avec Dani c’est quelque chose qui a beaucoup changé ma façon aussi de voir les textes, de voir les chants, l’interprétation. J’ai beaucoup apprise à ses côtés en étant sa guitariste, parce qu’elle a vraiment une façon de l’interpréter. Une distance, une ironie dans les texte, quelque chose comme ça « une distance amusée » qui a un ton qui me parle. Dani a l’exigence, quand on lui propose une chanson il faut qu’elle ait l’image, elle dit : « j’ai l’image, ou j’ai pas l’image ». Et ce truc là d’avoir l’image immédiate quand on entend une chanson, ça m’est restée, en tout cas dans ma façon d’écrire. C’est quelque chose que j’ai cherché avec cet album, provoquer l’image, le visuel.

Justement on arrive à ce nouvel album pour lequel tu as fait appel à un financement participatif qui à très rapidement atteint les 100 %

Oui on espère aller plus loin, on a encore un peu de temps !

Un nouvel album que tu qualifies de road trip imaginaire… Qu’entends-tu par là ?

Je me suis imaginée au volant, traversant, revisitant, découvrant des lieux, des émotions, des histoires amoureuses. Les chansons c’est comme des étapes, des paysages qu’on traverse, un itinéraire. J’ai vécu à nouveau des instants, j’en ai imaginé d’autres. J’ai eu besoin de me projeter dans des endroits, même en y étant jamais allée mais d’essayer d’avoir cette écriture du mouvement, ces images tournées vers quelque chose qui défile. J’ai voulu la musique très visuelle aussi. Pour que chacun.e.s puisse se faire sa propre route à travers NEVΛDΛ. C’est aussi un voyage très intime évidemment. Avec tout le côté intérieur de la « bagnole », c’est un habitacle où on a tous et toutes vécu tellement de choses !

Tu as un peu pris les devants sur notre question qui est celle de savoir si c’était la situation actuelle qui t’avait donné envie de voyager et/ou de faire voyager ton public ?

C’est sûr qu’avec le confinement on est hyper nombreux, nombreuses à faire vachement de rêves, je ne sais pas si à toi ça t’est arrivé ?! Pendant le confinement on a rêvé comme des dingues et j’en ai parlé avec des amis, et ils me disaient que eux aussi avaient des rêves qui étaient très très riches. Je pense aussi que c’est le corps, enfin l’inconscient qui compense un défaut de réalité avec quelque chose de beaucoup plus créatif. C’est vrai que ce mouvement là, de partir de quelque chose de vécu et de s’en échapper, d’aller vers quelque chose de beaucoup plus rêveur, cela a été la démarche de cet album. Donc voyager immobile, dans sa tête, dans ses chansons.

En voyant les visuels et en connaissant un peu ton univers, on t’imagine tout de suite au volant d’une mustang sur la route 66 avec ta guitare comme seule compagnie. Avons-nous visé juste ?

Bah ouais parce qu’en fait quand on dit « Road trip », on pense tout de suite à ça, aux États-Unis, et l’album il s’appelle Nevada. C’est pour ça que j’ai choisi ce titre parce que c’est à la fois le véhicule, la bagnole, la Nevada qui ne se fait plus donc, un peu le côté nostalgique vintage, il y a quand même une humeur un peu nostalgique dans l’album. Et puis Nevada, les États-Unis dans lesquels moi j’ai jamais mis les pieds. Mais tout de suite ça fait rêver, c’est une destination de rêve, on imagine qu’on est au volant et on voit la route 66 et ça m’amusait vraiment de jouer sur ces codes là. Et tout ça, c’est vraiment imaginé puisque je n’y suis jamais allée. C’était intéressant ce côté imaginaire, fantasme collectif. Et puis dans NEVADA il y a le mot s’évader qui résonne, et plus central le mot VA. C’est donc une invitation au voyage, une invitation à transformer le réel en l’imaginant, en le recréant, quoiqu’il advienne !

L’album va aborder les voyages, Mais il y a des thèmes qui sont en adéquation avec des voyages plus internes comme tu disais ?

Je pense que c’est un mouvement continu. J’ai vraiment construit le disque en un mouvement continu entre l’extérieur et l’intérieur. Ça parle de moi, d’un vécu, d’une émotion que j’ai ressentie à un moment et tout d’un coup ça se projette là et ça prend une route que j’attendais pas forcément. C’est comment je déroule le film de cette histoire, je prends un itinéraire en fait. C’est vraiment comme ça que je le vois. C’est aussi souvent des chansons adressées. Un road trip amoureux aussi, qui parle de désir, qui parle de la déception. il y a aussi tous ces thèmes là qui sont abordés. Et toujours un prisme du voyage et de l’espoir aussi, la nouvelle relation aussi. Enfin il y a aussi toutes les étapes amoureuse que tu peux identifier au voyage. Parce qu’en amour c’est pareil, c’est un voyage une relation amoureuse.

Tu parles beaucoup d’amour dans cet album

(Rire) je pense que c’est en filigrane, mais oui bien sûr c’est difficile de ne pas parler d’amour dans un album, de toute façon d’une manière ou d’une autre on y revient. Parce que moi je le vois comme quelque chose de génial qui motive l’être. Le désir de vivre tout simplement. Donc quoi que ce soit l’amour ou l’amitié c’est deux choses qui sont toujours présentes entre eux. Donc oui je dirais que c’est un « Road trip amoureux » qui s’adresse à quelqu’un, peut-être à plusieurs personnes…

Est-ce un projet de longue date ou est-il arrivé sur un coup de tête ?

En fait Nevada c’est la première chanson que j’ai écrite pour l’album, c’était pendant ma tournée d’avant. Ce n’est pas de très longue date j’ai mis deux ans à tout faire. J’ai fait quelques morceaux en 2020 et j’ai terminé en décembre dernier. Donc c’est vrai que c’était sur un temps court. Ce qui me plaît aussi… Ce qui m’a permis aussi de construire ce disque de A a Z, vraiment cette histoire ce « Road trip amoureux », alors que d’habitude un album ça peut se faire sur plusieurs années, plusieurs mois et là il y a vraiment quelque chose qui est condensé. Et je pense aussi que c’est cette urgence à revivre qu’on a eu quand on était en confinement qui fait que j’avais envie de ça.

Dani a beaucoup participé à ton évolution musicale. Peut on s’attendre à un duo avec elle comme sur le premier album ?

Il y en a déjà un dans le premier du coup je ne vais pas refaire ça sur le suivant. Mais par contre elle est vachement présente, Elle écoute les morceaux, Elle est très très importante dans ma démarche et dans ce processus. Après je ne veux pas faire la même chose d’un album à l’autre. Je n’ai pas refait de duo avec elle, mais après on n’est pas à l’abri que l’on se retrouve ensemble sur scène pour chanter certaines de mes chansons.

En quelques mots comment décrirais-tu ce nouvel opus ?

un « Road trip imaginaire et amoureux » c’est vraiment ce qui définit cet album. Autant dans les mots que dans la musique. Et j’espère que ça fera surtout voyager les gens. C’est vraiment une invitation à voyager. C’est une musique assez positive qui a un côté solaire. Nous l’avons dans une joie profonde.

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?

D’avoir le plus de passagers possible, à côté de moi, avec moi !

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