Retour sur quatre jours d’audace, de diversité et de performances inoubliables au cœur de la 46e édition des Trans Musicales, qui s’est déroulée à Rennes du 4 au 8 décembre 2024
Rennes, terre de découvertes musicales, a refermé les portes de la 46e édition des Trans Musicales, qui s’est tenue du 4 au 8 décembre 2024. Chaque année, le festival transforme la capitale bretonne en une cité utopique, un espace où la musique gomme toutes les différences. Jeunes curieux, passionnés de musiques alternatives et dénicheurs de pépites ont cohabité dans une ambiance bienveillante, portés par une programmation qui refuse les frontières. En prônant l’éclectisme et la découverte, le festival a tissé une mosaïque sonore où l’héritage, l’avant-garde et l’énergie brute dialoguaient. Retour sur un voyage musical de quatre jours.
Mercredi 4 décembre : Une ouverture sous le signe de la poésie et de l’introspection
C’est dans l’intimité de la Salle de la Cité que Ziyad Al-Samman a donné le coup d’envoi des festivités. En mêlant folk arabe et pop occidentale, il a créé des paysages sonores d’une rare délicatesse. Le public a été transporté par son oud dialoguant avec des guitares électriques. Son morceau phare, « Habibi », a marqué un moment de grâce, mélangeant mélancolie et espoir. L’atmosphère était suspendue, idéale pour débuter ce voyage musical avec douceur.
Le voyage s’est poursuivi avec Roshâni, projet genevois porté par Roxane Dumont et Inès Mouzoune. Accompagnées par Yavor Lilov à la batterie, elles ont dévoilé une pop électronique fascinante, empruntant au farsi, au français et à l’espagnol. Leur premier EP Alma De Baile a révélé un monde sonore vibrant, où chaque morceau invite à la danse et au voyage.
Enfin, la soirée s’est conclue avec Girl Ultra, alias Mariana de Miguel, qui a confirmé son statut de figure montante du R&B mexicain. Avec sa voix envoûtante et son mélange audacieux d’électronique et de rock, elle a impressionné avec des titres mêlant mélodies électroniques et influences rock. L’audience, captivée par son interprétation de morceaux issus de son EP Blush, a faut corps avec elle, portée par toute la sensibilité et la puissance de sa musique.
Jeudi 5 décembre : Exploration et rythmes enivrants
Le jeudi a offert une programmation riche et variée. Mayssa Jallad, artiste libanaise, a ouvert les festivités à Les Champs Libres avec une performance poignante. Alternant entre poésie engagée et compositions instrumentales mêlant oud et violon, elle a su créer un communion rare avec la salle par sa sincérité et son intensité.
Au Liberté, Megadisq a électrisé la fin d’après-midi avec un set explosif. Synthétiseurs rétro, grooves imparables et une énergie débordante ont plongé le public dans une fête pop-futuriste. Leur esthétique joue sur la nostalgie et l’avant-garde, redéfinissant les codes de la musique électronique.
Plus tard, à l’Ubu, la bretonne Quinquis a livré un concert délicat et envoûtant. Sa voix cristalline, posée sur des nappes électroniques minimalistes, a créé un moment de pure émotion. Une performance qui prouve que la scène bretonne peut rivaliser avec les plus grands artistes internationaux.
Le clou de la soirée a été la performance des Zawose Queens, un collectif tanzanien qui a offert un show vibrant et coloré. Mélangeant polyphonies traditionnelles et percussions endiablées, elles ont transporté la foule dans leur univers ancestral. Leur énergie communicative et leur sens de la fête ont confirmé que les Trans Musicales savent dénicher les trésors des musiques du monde.
La soirée s’est terminée par une montée en puissance. Mia Koden, mélangeant héritages africains et culture sound system londonienne, a exploré tous les recoins de la bass music. Puis, Crystallmess, avec son DJ set électrisant mêlant techno et rythmes caribéens, a fait basculer la foule dans une transe collective.
Vendredi 6 décembre : La collision des genres
La journée a débuté au Liberté avec le trio Mina Raayeb et leur show à couper le souffle. Mélangeant hip-hop, rock industriel et des influences bruitistes, ils ont livré une vision apocalyptique de la musique, portée par des textes percutants et des sonorités inquiétantes. Leur premier EP Opponents, dévoilé en septembre 2024, promet déjà d’être une révélation.
L’après-midi a continué avec les locaux Mansion’s Cellar, dont le rock psychédélique a hypnotisé les spectateurs. Leurs guitares tourbillonnantes et leur énergie scénique ont créé une atmosphère envoûtante, où chaque morceau semblait s’élever comme un mantra. Liv Oddman a ensuite pris le relais pour proposer une électro cosmique entre tension et évasion. À mi-chemin entre rave et voyage astral, sa performance a plongé la salle dans une autre dimension, captivant aussi bien les amateurs de dancefloor que les explorateurs sonores.
Dans les halls du Parc Expo, les univers se sont bousculés. La DJ queer Mars O10C a célébré l’audace avec un set brut et subversif, tandis que Valise, duo rennais, a prouvé que Rennes n’a rien à envier à Berlin en matière d’électro. Du côté de la Hall 5, Adiel a livré une techno implacable, alternant entre tension et libération, suivie par le groupe Pureblast, anciennement Baraka, dont les basses profondes ont fait vibrer les murs. Le clou de la soirée fut l’explosive Taahkliah, qui a transformé la Hall 2 en une cathédrale de la hard dance, prouvant que puissance et émotion peuvent cohabiter sur le dancefloor.
Autre révélation : Def MaMa Def, duo sénégalais formé par les talentueuses Mamy Victory et Defa, a électrisé la Hall 3. Avec leurs voix puissantes, mêlant rap et chant R&B en wolof, elles ont livré une performance à la fois virtuose et profondément enracinée dans la culture sénégalaise. Accompagnées de musiciens, elles ont su marier rythmes hip-hop électroniques et sonorités acoustiques, créant une ambiance exaltante, et prouvant une fois de plus que la scène africaine est l’un des poumons créatifs les plus dynamiques du moment.
Samedi 7 décembre : La fête comme art total
Basic Partner a ouvert la soirée au Liberté avec un concert puissant et envoûtant. Le quatuor, fruit de la collaboration entre musiciens nantais et rennais, a transporté le public dans un univers où le rock psychédélique rencontre une énergie brute et mélodique. Entre guitares rageuses, rythmiques intenses, envolées de saxophone et une voix profonde, leur performance a alterné entre tension et libération. L’un des moments forts de leur set a été l’interprétation de leur nouveau single « New Decade », où la tension entre la froideur du présent et l’espoir d’un avenir meilleur, planait dans la salle. À mi-chemin entre chaos et harmonie, Basic Partner a confirmé son potentiel à marquer durablement la scène rock.
Dans les halls du Parc Expo, la richesse des propositions a culminé pour la dernière soirée. Le quatuor Friedberg, mené par Anna F., a pris la scène du Hall 4 d’assaut avec des mélodies pop-rock imparables. Chaque morceau semblait familier, tant leurs refrains efficaces s’impriment instantanément dans la mémoire. Une performance qui augure un bel avenir pour ce groupe basé à Londres. Le moment fort de la soirée a été la prestation de Delaurentis, qui a offert une techno mélodique à la fois puissante et lyrique. Sa maîtrise des envolées cinématographiques a laissé une empreinte forte dans l’esprit du public.
Du côté de la Greenroom, c’était saturday night fever. Le du duo rennais de musique électronique Mac&Wester, a fait sensation en proposant un show visuel et sonore d’une grande intensité. Leur anonymat scénique, renforcé par une esthétique visuelle travaillée, place la musique au centre de tout. Avec leur dernier single « Burn Me », ils confirment leur capacité à marquer les esprits. La DJ rennaise Söwe a envoûté le public avec un set house envahi de mélodies hypnotiques, tandis que Faizal Mostrixx, chorégraphe et producteur ougandais, a livré un show unique mêlant danse futuriste et rythmes tribaux. Enfin, Lazergazer, DJ syrienne installée aux Pays-Bas, a conclu cette édition avec un set poignant. Sa techno, mêlant influences orientales et rythmes hypnotiques, a été une ode à la diversité et à la puissance de la musique électronique.
Et maintenant ?
Si les Trans Musicales 2024 ont prouvé une chose, c’est que l’audace est plus que jamais un moteur essentiel de la création musicale. Alors que certains festivals s’essoufflent dans des têtes d’affiche mainstream, les Trans continuent de creuser leur sillon, celui de la découverte et du frisson. En sortant du dernier concert, une phrase murmurée dans la foule résume parfaitement cette édition : « Si on les revoit ici l’an prochain, ils seront trop grands pour nous. » C’est tout l’esprit des Trans : être à l’avant-garde, au moment où tout commence. On quitte Rennes avec l’impression d’avoir vécu un moment unique et l’espoir que les artistes de cette édition seront sûrement les stars de demain.

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