Partir, c’est parfois tout un art. Entre hésitation, nostalgie et élan vers l’inconnu, Reb capture ce moment fragile où l’on se détache pour mieux se retrouver. « Partie », son nouvel EP, dévoile six morceaux suspendus entre mélancolie et liberté.
Partir, ce n’est jamais juste prendre la porte et disparaître. C’est un art délicat, une science instable. Il y a des hésitations, des accélérations, des nœuds dans la gorge et des moments de grâce. Il y a aussi de la musique, celle qui accompagne les décisions irréversibles et les pages qui se tournent. Partie, le nouvel EP de Reb, raconte tout cela. Six morceaux pour décortiquer l’avant, le pendant et l’après d’un départ. Comme une dissection de l’instant où l’on décide qu’il est temps.
La bande-son d’un départ
On ne part jamais d’un coup. D’abord, il y a l’idée, cette sensation sourde qu’il faut bouger. « Too Late Toulouse » pose la première pierre de cet exil intérieur. Pas un hymne au voyage, mais une errance. Un piano qui ouvre la route, une guitare électrique qui surgit sans prévenir. On ne sait pas si l’artiste fuit ou si elle se cherche, mais ce qui est certain, c’est qu’elle ne peut plus rester. La chanson française est là, dans l’écriture ciselée, dans la voix claire, mais l’instrumentation ouvre des brèches vers un ailleurs plus vaporeux, quelque part entre la folk atmosphérique et la dream pop.
Le morceau-titre, « Partie », pousse encore plus loin ce jeu d’équilibre. La voix, d’abord fragile sur un simple piano, se laisse peu à peu emporter par des vagues sonores qui s’épaississent. Les chœurs se multiplient, les instruments s’enchevêtrent, et ce qui semblait n’être qu’une confession intime devient un véritable exutoire. Reb maîtrise l’art de la montée en puissance sans jamais tomber dans l’excès, construisant une tension qui culmine sans éclater brutalement, mais en s’évanouissant presque naturellement.
Mais même quand on part, on emporte quelque chose. « Andrea » est ce vestige, cet amour intact qui survit à la distance. Un rythme feutré, une guitare électrique qui ponctue chaque phrase comme pour s’assurer qu’on écoute bien. Ce n’est pas une chanson d’amour classique, c’est une promesse. On peut tout quitter, sauf ceux qui nous habitent. Le problème, c’est que le passé colle aux semelles. « Tout Bazarder » en est la preuve. Un morceau hanté par le doute, où l’artiste tente de se libérer des objets, des souvenirs, des poids invisibles. Mais est-ce seulement possible ? Chaque refrain est une tentative de rupture, un mantra pour s’en convaincre : « Tout bazarder, si seulement j’pouvais… »
Et puis, plus rien. Juste une guitare, une voix. « Partie » revient, nue, épurée, comme une dernière image avant de disparaître. Plus besoin d’effets, plus besoin d’en faire trop. Le départ est consommé, il ne reste que l’essence.
Reb signe ici un EP à la fois limpide et complexe, où chaque arrangement, chaque texture sonore est pensé pour servir une écriture qui ne cherche jamais l’effet gratuit. Au-delà d’être un disque sur le départ, Partie est un disque qui l’incarne, dans sa progression, dans sa façon de se transformer au fil des morceaux. Un disque qui ne se ferme pas sur lui-même, mais qui laisse la porte entrouverte, comme une promesse de retour.
