Da Capo revient du côté de l’ombre avec Songs from the Shade, un neuvième album bouleversant, entre poésie noire et tensions orchestrales. On en parlait déjà avec le clip glaçant d’Alone et on confirme aujourd’hui, c’est un disque à part.
Da Capo fait partie de ces groupes qu’on n’a jamais vraiment vus sous la lumière, mais qu’on n’a jamais oubliés non plus. Depuis bientôt trente ans, Alexandre Paugam trace une route discrète, loin des effets de mode, mais toujours avec cette exigence rare dans la pop orchestrale. L’histoire a commencé aux côtés de son frère Nicolas, mais désormais seul à la barre de Da Capo, Alexandre, signe un vertigineux retour en clair-obscur. Le projet est devenu plus intime, plus radical aussi.
L’ombre omniprésente
Songs from the Shade arrive deux ans après The Light Will Shine on Me, qui ouvrait quelques fenêtres. Cette fois, les rideaux sont tirés. On descend dans quelque chose de plus opaque, de plus intérieur. Le titre ne ment pas. L’ombre est partout.
« Alone » avait donné le ton. Le morceau serre la gorge. La montée est sèche, tendue, presque brutale. Le clip, coréalisé par Paugam lui-même, prolonge ce vertige, entre errance glacée et silence assourdissant. Avant ça, « Ring the Bells » autre extrait dévoilé, ne laissait pas non plus beaucoup d’espoir, cordes tranchantes, cloches, cuivre, tout craque sous la pression. La beauté, ici, naît du déséquilibre.
Quand tout vacille
Le reste de l’album ne redresse pas vraiment la tête. Il s’enfonce, morceau après morceau, dans une narration troublante. Celle d’un roi qui perd pied, ou peut-être simplement d’un homme qui ne trouve plus sa place. « Shadow », « I Need You », « Hear My Brother »… chaque titre avance dans une sorte de brouillard soigné, où la douleur se tient droite. Pas de débordement, pas de pathos. Tout est retenu. Tout est composé.
« Skeletons » marque une accalmie. Piano et cor anglais ouvrent un peu l’espace. Ce n’est pas un répit, mais une respiration. Le dernier mot revient à « You Cry », fragile, nu, presque chuchoté. Comme une main tendue, maladroite, après la tempête.
Songs from the Shade est un disque habité, construit sur une tension constante entre le lyrisme et l’épure. C’est aussi une œuvre de solitude, au sens noble. Un disque qui ne cherche pas à plaire, mais à dire. Et qui, justement, qui regarde le monde droit dans les yeux, même quand tout s’effondre.
