Trois jours de fête, de son et d’émotions à Saint-Brieuc pour Art Rock 2025 ! Entre lives mémorables, ambiance survoltée et découvertes surprenantes, on vous raconte tout ce qu’il ne fallait pas manquer.

Samedi,  On débarque dans la ville en ébullition

On arrive à Saint-Brieuc en fin de journée, samedi. À peine sortis de la gare, une exposition nous cueille : Art Rock, festival en transition plante le décor, directement sur le parvis. La ville est déjà en tension festive. Autour de la cathédrale, c’est la ruée, on récupère nos accréditations dans une ambiance de kermesse urbaine, les bars débordent, les verres trinquent, les enceintes crachent des beats. Tout le monde est dehors. La ville a le cœur qui pulse.

Ça fait des années qu’on couvre Art Rock, mais chaque édition réussit encore à nous surprendre. Ça sent l’été, la bière, les fringues légères malgré le froid et l’impatience d’en découdre. Le festival affiche complet depuis deux mois, et ça se ressent dans chaque ruelle. On sent aussi ce petit frisson d’excitation dans l’air, malgré un vendredi un peu manqué pour nous. On a raté Yelle, qui lançait sa tournée anniversaire au festival, célébrant 20 ans de carrière avec un set intense et émouvant. Tout comme Kompromat, dont on avait apprécié la prestation récente à Nuits Sonores. Mais l’ambiance ne fait que monter ce samedi, avec une météo clémente qui invite à profiter pleinement de la fête.

La foule dans les rues de Saint-Brieuc.

Angélique Kidjo : l’icône franco-béninoise envoûte Saint-Brieuc

On arrive en retard sur la grande scène, juste à temps pour attraper la fin de la prestation d’Angélique Kidjo. Pourtant, on ressent immédiatement la puissance et la générosité qui émanent de cette star mondiale. Sa voix puissante et son énergie communicative traversent la foule, captant toute l’attention. Kidjo, c’est une légende vivante qui réussit à mêler tradition et modernité avec une aisance déconcertante, et ce soir ne fait pas exception.

Son concert, même raccourci, est une invitation au voyage, une célébration des racines africaines transcendée par une présence scénique rare. Les applaudissements nourris témoignent d’un public captivé, même si, à notre arrivée, on aurait aimé profiter de la totalité de ce moment unique. La soirée promet d’être riche en émotions, et on le sent déjà dans l’air doux qui caresse les rues de Saint-Brieuc.

Ne Rangez Pas Les Jardins, Un trio poétique et magnétique

Notre premier vrai choc, c’est ce moment inattendu sur la scène B. Une dame nous demande du feu, elle montre la scène : « C’est ma fille là-bas. » Sur scène, Léa Diglois, voix magnétique du trio Ne Rangez pas les jardins, nous attrape par le col et nous balance dans un vortex musical. Leur morceau éponyme, tout juste sorti, nous cueille avec sa douceur désarmante avant de s’emballer dans une rythmique désarticulée, à la fois poétique et brute. Louis Hamon à la guitare et Franck Richard à la batterie assurent un groove instable mais vibrant. C’est beau, étrange, et totalement captivant.

Ce trio, c’est une promesse, celle que la poésie a encore sa place dans les festivals. Une musique qui ne cherche pas à plaire, mais qui attrape l’âme. Le public est resté scotché, et nous avec.

Philippe Katerine, Le roi des bananes et des paillettes

Philippe Katerine, c’est le seul artiste capable de transformer la place Poulain-Corbion en piste de danse absurde. Déguisements de bananes, pluie de paillettes, chorégraphies décalées… tout y est. Son univers déborde sur scène, et surtout dans le public, qui se prend au jeu. Quand une douzaine de bananes monte sur scène pour danser avec lui, on atteint un niveau de surréalisme rare. Mention spéciale à une scénographie léchée, ludique et parfaitement calibrée pour ce grand enfant qu’est Katerine.

Il aurait pu se contenter de la blague, mais son show est sincère. Il veut faire du bien. Et ça fonctionne. On repart avec le sourire collé au visage et « La Banane » en boucle dans la tête.

Éloi, Colère, sueur et communion nocturne

Elle est arrivée avec la rage au ventre, comme lors de son Olympia le 1er avril dernier. Éloi, flanquée de ses deux musiciens, a fait trembler la scène B avec un show viscéral. « Métal/kid » éclate dans les enceintes pendant qu’elle hurle sa vérité, appuyée par un visuel fort : « Faut qu’il en reste un peu pour moi » s’affiche en arrière-plan.

Le public est compact, en fusion. Quand elle termine sur « Bien mérité », la fosse la porte, ça “pull up”, ça “shoot”, on se croirait à un after sauvage. « Ça va rester gravé en nous. ». Il est 1h32 quand elle quitte la scène, vidée, le public aussi. KO debout, tous ensemble. On se souvient encore de la claque à son Olympia et on comprend pourquoi elle fédère autant.

MYD, Club en bermuda sur la grande scène

Direction la grande scène pour finir la soirée avec MYD. T-shirt coloré, bermuda, lunettes de soleil : il arrive avec l’énergie d’un été permanent. Son set est à son image : dansant, lumineux, jamais prétentieux. Il alterne entre ses classiques et des passages plus house, toujours avec cette patte un peu pop qui le rend si accessible.

Visuellement, c’est un régal, lui qui se projette en temps réel sur des écrans géants, lunettes vissées sur le nez, dans un décor aux couleurs pastel. La foule ondule jusqu’au bout. On ressort rincés, mais heureux.

SEXTILE, Tornade californienne au Forum

On décide de prolonger un peu la nuit. Direction le Forum, pour une virée plus underground. C’est là qu’on tombe sur Sextile, trio venu de Californie, qui fusionne post-punk et électro comme personne. Leur set est une montée en puissance, un truc qui prend à la gorge et ne te lâche pas.

Ça transpire la transe et les synthés. Le public est en transe jusqu’à 3h du mat. On sort de là hagards, lessivés, heureux.

DIMANCHE, La ville ne redescend jamais

Le dimanche, ce n’est pas la descente, c’est un dernier tour de piste. Entre la vélo-parade musicale, les duos pop rock d’Outcycle et Visconti Park, ou encore le set explosif d’Uzi Freyja sur la scène B, la ville ne s’arrête jamais vraiment. On croise des familles, des fans de musique, des touristes égarés qui se laissent happer. Art Rock, c’est aussi ça : une fête qui dépasse les scènes.

THEODORA, Boss Lady, tout feu tout flamme

C’est le phénomène du moment. Theodora, c’est une montée en puissance. Devant une fosse surexcitée, elle lâche ses tubes avec une présence rare. Elle explose tout sur scène, avec un charisme brut et des punchlines qui claquent. « Vous avez vu mon nouveau clip ? », lance-t-elle avant de balancer « Fashion Designer ». Le public est en feu. « Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis Theodora, on m’appelle Boss Lady. C’est non genré. » Le ton est donné. Engagement, charisme et tracks qui font vriller les basses.

Elle termine avec « Kongolese sous BBL », que tout le monde chante en chœur. C’est si puissant qu’elle le relance une deuxième fois. Il fait si chaud que même un mec en ailes d’abeille (clin d’œil à Maya dans les paroles) se met à danser comme s’il allait décoller. On ne comprend pas pourquoi elle n’est pas sur la grande scène. C’est clairement la star du dimanche.

CAT POWER, La grâce fragile

On passe par la grande scène pour attraper Cat Power, monument discret venu réinterpréter le fameux concert de Bob Dylan au Royal Albert Hall de 1966. C’est sa seule date française cette année. Sa voix voilée, ses chansons ciselées, tout est là pour émouvoir.

Mais le public semble à moitié ailleurs. Un peu distrait, peut-être trop impatient pour Franz Ferdinand. Dommage. Car c’était précieux, rare. Un moment de grâce que beaucoup auront laissé passer.

YSEULT, Brut, beau, bouleversant

Après We Love Green vendredi dernier, on retrouve Yseult ce dimanche à Art Rock. On arrive au moment du tube « Alibi » en feat (absents) avec Sevdaliza et Pabllo Vittar. Le public est moins chaud que la dernière fois, mais elle ne lâche pas l’affaire. Chaque chanson est un uppercut, « MTV », « Gazoline », « Suicide »… elle se livre, entière, sans filtre.

« Les médias disent que mon album c’est de la merde… mais moi je sais ce que ça coûte de le financer seul. » Elle serre le poing, remercie le public. Elle n’est pas là pour plaire, elle est là pour être libre. Et ça, ici, ça résonne fort. « Merci Art Rock de me donner la parole. »

FRANZ FERDINAND, Retour royal des Écossais

Sur la grande scène, Franz Ferdinand fait son grand retour à Art Rock après 21 ans d’absence. Emmené par un Alex Kapranos en grande forme, le groupe ouvre son concert avec le classique « Dark of the Matinée », déclenchant immédiatement la folie dans la foule. Les tubes s’enchaînent, anciens comme nouveaux, notamment « Night Or Day » tiré de leur dernier album.

La place Poulain-Corbion est archi pleine, et l’ambiance est à son comble. Le rock écossais, royal et sans faille, offre un spectacle puissant qui réchauffe les cœurs et fait vibrer les corps. Pour les fans comme pour les novices, c’est une belle claque et une manière parfaite de prolonger l’énergie du festival.

Roszalie : la claque finale sur la scène B

Après les avoir découverts aux 3 Éléphants le 16 mai dernier, on était curieux de voir ce que le trio rennais Roszalie allait proposer à Art Rock. Verdict ? Une vraie claque sonore pour clôturer la scène B dimanche soir. Les trois musiciens, disposés en cercle autour d’une batterie centrale, balancent un set aussi spontané que jouissif. Entre électro sous tension et rock qui déborde, tout est joué à l’instinct : ça breake, ça improvise, ça pousse les structures dans leurs retranchements.

Pas de pause, pas de routine, Roszalie saute à pieds joints dans ses morceaux comme dans un terrain de jeu. L’énergie est brute, sincère, et totalement contagieuse. Dans la fosse, ça danse, ça sourit et on sent que beaucoup repartent avec un nouveau groupe à suivre de près.

DOMBRANCE, Électro politisée et after imaginaire

Pour clore ce festival en beauté, Dombrance prend possession de la grande scène avec son électro politique et collective. Entre son pupitre orné de la phrase « Pour une France qui danse » et ses deux machines à chaque extrémité, il balance des titres aussi engagés que dansants : « Poutou », « Barack Obama », « Coppé »…

L’ambiance est à la fête manifeste, la foule en transe répond à chaque pulsation. Sur l’écran géant, un dernier message s’affiche : « Merci Art Rock, merci Saint-Brieuc, il est où l’after ? » Une façon parfaite de conclure cette édition riche en émotions et découvertes, en laissant le public sur sa faim… pour mieux revenir en 2026.

POGO CAR CRASH CONTROL, Dernier uppercut au Forum

Juste le temps de filer une dernière fois au Forum pour attraper Pogo Car Crash Control. Deux frères (guitare, batterie), une bassiste redoutable, un chanteur possédé. Leur punk rugueux, mais maîtrisé, séduit un public conquis d’avance, prêt à finir la nuit dans la joie et la folie. Une belle façon de dire au revoir à cette édition, avec la promesse que la fête continue, même après la dernière note.

Rendez-vous en 2026

80 000 festivaliers, des rues pleines à craquer, et une programmation dense et audacieuse. Malgré quelques bémols, notamment une organisation à l’entrée à revoir pour éviter les longues files d’attente, Art Rock 2025 a su offrir un spectacle riche, vibrant et diversifié. C’était aussi la dernière édition de Carole Meyer, directrice du festival depuis 2018. Elle part à Jakarta, mais laisse derrière elle un festival en pleine santé. Rendez-vous est déjà pris : Art Rock revient les 22, 23 et 24 mai 2026. Et nous, on y sera. Encore.