Retour sur trois jours de musique, d’émotion et de pluie (parfois) au cœur de We Love Green 2025. Des shows magistraux, des surprises scéniques, et une énergie collective intacte. Voici ce qu’on en retient 

Le festival éco-responsable parisien We Love Green a repris ses quartiers du 6 au 8 juin dans une ambiance électrisante et (presque) épargnée par la pluie. Malgré une affluence en baisse par rapport aux années précédentes (seule la journée du samedi affichait complet), la programmation éclectique a une fois de plus transformé la prairie en un foisonnant terrain d’expérimentations musicales.

Vendredi, Lancement tout en contrastes

Vendredi, We Love Green a lancé les hostilités sous un ciel étonnamment clément. Entre la fougue de Tiakola, les fulgurances de Vald et le retour électrisant de Kavinsky, le parc a retrouvé des airs de dancefloor géant.

Didi Han VS Tiakola

On est happé d’entrée de jeu par Didi Han, qui ouvre le bal sur la scène Lalaland (juste à côté de l’entrée), installant en douceur une ambiance groovy et solaire. Première caresse sonore avant les secousses. On en vient même à oublier que de l’autre côté de la Prairie, ça fait une heure que Tiakola est sur scène.

Le jeune prince du rap français, fort de deux Accor Arena complets, livre un show parfaitement maîtrisé. Hits calibrés, présence scénique assurée, il confirme qu’il est bien l’un des poids lourds de la scène actuelle. Une bonne entrée en matière qui nous permettra de mieux apprécier le show d’Yseult, juste après.

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Vald, comme à la maison

Après le Printemps de Bourges en avril dernier, on retrouve Vald ce vendredi à We love Green. Et cette fois-ci, il joue à la maison et le public ne se fait pas trop prier quand résonne, « Faites du bruit pour Vald… » Fidèle à sa réputation de trublion intelligent, le rappeur débarque sur scène en terrain conquis. Flanqué de Suikon Blaz AD et d’un crew de danseurs en chasubles fluo, il propose un show aussi introspectif qu’explosif. Entre punchlines espiègles et beats gabber, il fait pogoter la foule dans des cercles effervescents.

Son entrée sur « Régulation Reloaded » (sans Vladimir Cauchemar ni Todiefor) annonce la couleur, Vald, n’a jamais autant chanté ni autant régalé. On en redemande, comme toujours.

Salute Kavinsky  

Salute, DJ venu de Manchester, s’installe en douceur juste avant le choc Kavinsky. Ambiance chill et mélodique, parfaite pour faire redescendre la tension avant le clou du spectacle.

Kavinsky enfin, mythique pour son « Nightcall » immortalisé dans Drive, signe un retour triomphal. Son album Reborn prend ici toute sa dimension : live hypnotique, nappes rétro-futuristes, basses mordantes. Le public est en transe dans la fosse, ça déborde de partout, ça danse, ça hurle parfois. Cette apothéose sur la scène Lalaland était très attendu, tellement attendu que les corps semblent shootés à ce je ne sais quoi.

Il boucle son set en apothéose avec « Nightcall », devenu culte depuis sa reprise lors de la cérémonie de clôture des JO 2024 avec Angèle et Phoenix. Une claque.

SDM, et puis s’en va !

De l’autre côté de la Prairie, on retrouve un SDM en plein forme. L’ancien protégé de Booba clôt la programmation rap de la soirée sur la grande scène, devant un public qui n’est pas prêt de lever l’ancre. Face aux irréductibles qui dansent encore sous les lumières, il aura cette phrase : « La meilleure ville du monde ». Rien que ça !

@xsl1

Samedi : La pluie, les shows, et une Charli XCX impériale

Samedi, le festival We Love Green a tenu bon sous une météo capricieuse. Malgré la pluie, les performances se sont enchaînées avec une intensité rare. De la pop puissante de Théodora au retour saisissant de Gesaffelstein, en passant par la célébration brat de Charli XCX, cette journée a brillé par sa diversité et sa puissance scénique.

Kongolese sous bruine

À peine arrivés dans l’enceinte du festival, nous sommes happés par la foule compacte qui attend Théodora sur La Canopée. Difficile d’imaginer, il y a encore quelques mois, que la « boss lady » ferait une telle sensation, au point de mériter la grande scène tant elle est devenue incontournable. Malgré la pluie fine et l’espace réduit, le public ondule avec ferveur sur les tubes « KONGOLESE SOUS BBL » et « FASHION DESIGNA ».

Pour marquer le coup, Théodora crée la surprise en invitant trois artistes de la réédition MÉGA BBL à la rejoindre sur scène : Luidji, Chilly Gonzalez et Juliette Armanet. Une vraie consécration, et sans doute qu’un début pour une artiste en pleine ascension.

Parcels

Le quintette australien fait fi de la pluie battante (et nous aussi) et livre un show euphorique, haut en couleur et en groove. Chaque morceau est une invitation à se laisser porter, de « Tieduprightnow » jusqu’à leur dernier single « Yougotmefeeling ». À l’image de leur album Day/Night, leurs sonorités électro-funk illuminent nos cœurs et le décor nocturne du festival.

On repart avec un sourire sur le visage, et une certitude : Loved, leur troisième album attendu pour le 12 septembre, sera sur toutes nos playlists de rentrée.

Gesaffelstein, une descente dans les ténèbres

Tandis que certains quittent La Prairie, un flot de silhouettes converge vers La Clairière, attiré par un nom quasi mythique : Gesaffelstein.

Disparu des scènes françaises depuis plus de dix ans, le « prince noir de la techno » revient pour un set intense et hypnotique. Derrière son masque, il distille une techno froide et tranchante, entre éclairs de lumière blanche et noirceur quasi totale.

Là où d’autres misent sur la chaleur, lui choisit l’ascèse. Et c’est justement cette austérité millimétrée qui captive : un show épuré, mais d’une puissance indéniable.

Charli XCX, le clou du spectacle

C’est l’instant que tout le monde attendait. Une marée de bras tendus, téléphones prêts à dégainer : la foule trépigne d’impatience avant l’arrivée de Charli XCX.

Un rideau aux couleurs de brat se déploie, et c’est l’explosion : sur le remix de « 365 feat. Shygirl », la foule se déchaîne, embarquée dans une messe de beats saturés et d’attitudes de sales gosses.

Les tubes s’enchaînent : « club classics », « von dutch » ou « apple », devenu viral sur TikTok. Mais les anciens classiques ne sont pas oubliés : « Vroom Vroom » ou encore « I Love It » font chanter les plus fidèles.

Le plus frappant ? Un show calibré au millimètre pour les caméras, chaque image étant retransmise avec frénésie sur les écrans latéraux. L’artiste britannique est capturée sous tous les angles : gouttes de pluie artificielle léchées avec provocation, booty shakes en culotte rose, défilés qui frôlent le public.

En guise d’adieu, un message vidéo clôt le show : brat fête son premier anniversaire, mais le phénomène, lui, ne fait que commencer.

Dimanche : Poésie, puissance et émotion pour clôturer en beauté

Dimanche, la dernière journée du festival a laissé place à la grâce, à l’introspection et à l’expérimentation. De Clara Luciani à LCD Soundsystem, en passant par FKA Twigs et Beach House, We Love Green a terminé en apothéose, entre communion collective et instants suspendus.

Un ciel bleu et Clara Luciani

Clara Luciani avait une revanche à prendre sur l’édition 2022 du festival, où l’averse avait contraint l’organisation à annuler plusieurs concerts, dont le sien. Il semblerait que son sourire radieux ainsi que son aisance sur scène aient réussi à chasser les nuages pluvieux du ciel.

Son entrée en scène s’accompagne d’un « Courage » fédérateur, immédiatement repris par une foule en liesse. Les tubes « Comme toi » et « Respire encore » font vibrer La Prairie, confirmant que la chanteuse est bel et bien l’une des figures phares de la chanson française.

Beach House

Dans une ambiance nocturne et brumeuse, le duo américain offre un show à l’image de leur son : rêveur et magnifiquement introspectif. Si l’on pouvait craindre un concert trop introspectif pour un festival en plein air, c’est en réalité une immersion sensorielle qui s’opère : les guitares planantes, les nappes de synthé et la voix envoûtante de Victoria Legrand forment une bulle sonore captivante.

Le public se laisse bercer, certains yeux fermés, d’autres enlacés, jusqu’au point culminant : « Space Song », joué en avant-dernier, qui déclenche une onde d’émotion dans la foule. Un moment suspendu, un concert hors du temps, comme une dernière bouffée de rêve avant le retour au réel.

FKA Twigs, LE spectacle du festival

Vous cherchez un spectacle complet, mélangeant danse et chant dans une structure narrative à trois actes comme au théâtre ? Bienvenue au concert de FKA Twigs. L’élément principal de sa scénographie : des cubes en métal que l’artiste et ses danseurs utilisent tantôt comme une vitrine derrière laquelle ils se meuvent, tantôt comme des cages dont ils se libèrent.

Si EUSEXUA a marqué un tournant dans la discographie de l’artiste, mais des titres plus anciens comme « oh my love » ou « cellophane » lui permettent de rendre hommage à toute sa discographie. On alterne ainsi entre combats chorégraphiés, pole dance ou chants a capella avec des notes suraiguës qui nous transportent dans l’éther.

FKA Twigs signe ici le spectacle le plus sensationnel de cette édition, où chaque minute mêle l’intensité physique à une grande sensibilité artistique.

LCD Soundsystem

LCD Soundsystem, le groupe culte de James Murphy, clôture enfin la soirée avec une énergie punk-disco irrésistible. Entre riffs mémorables et synthétiseurs analogiques, le groupe rassemble plusieurs générations sur la scène principale.

On voyage alors dans un univers sonore où des morceaux mélancoliques comme « oh baby » côtoient les titres fleuves aux drops explosifs comme « Dance Yrself Clean ».

C’est le moment parfait pour une communion massive, et lorsque nous disons au revoir à We Love Green, c’est avec les mêmes émotions ressenties lors de ce dernier concert : la joie d’avoir vécu ces trois jours et la nostalgie d’une fin arrivée si vite.

@lisa.miliani

À l’année prochaine !

Pendant trois jours, We Love Green a une nouvelle fois prouvé qu’il savait marier exigence artistique, éclectisme et engagement. Malgré une météo capricieuse et une affluence en légère baisse, cette édition 2025 restera marquée par des moments de grâce, de fête et de communion. Un rendez-vous musical et sensible, qui prouve que les festivals peuvent encore nous surprendre, nous émouvoir et nous rassembler.