À 28 ans de carrière, Sidilarsen s’offrait son premier Olympia le samedi 11 octobre dernier. Pour l’occasion, le groupe de métal électro humaniste toulousain avait invité Les Tambours du Bronx et MADAM à partager la scène avec lui.

Nous aimons beaucoup Sidilarsen que nous avions déjà eu le plaisir de croiser à deux reprises en festival, mais notre résidence étant en Normandie, soit à 3h de route environ de Paris, notre sélection de concerts parisiens se fait de manière assez drastique. Il faut bien avouer que l’élément déclencheur de l’achat de nos places fût l’annonce de MADAM (chronique de leur album Thanks for the Noise) en première partie. Porté.e.s par un élan démesuré d’optimisme nous avions osé espérer qu’il leur serait accordé une durée de 40 minutes pour leur set. Bien conscient.e.s que nos attentes étaient un peu hautes, nous tablions sur un minimum de 30 mais ce sera, en réalité, 25 minutes. On essaie de se préparer psychologiquement : ce sera beaucoup trop court.

MADAM

Comme à son habitude, notre trio de sorcières préféré arrive sur scène en mode bagarre direct avec un sourire et une complicité qui infusent en nous, autant de rage dans nos tripes que de folie euphorique dans nos cœurs. En dépit de l’impression qu’elles se sont mis un peu la pression ce soir, les cris dans la foule nous rassurent immédiatement : l’accueil du public est enthousiaste. La Meute (comme la chanson du même nom jouée dans la première moitié du set) comptera, dès ce soir, de nouveaux adeptes (groupe Facebook La Meute des fans de MADAM). Cependant, nous sommes habitué.e.s à un peu plus de bordel dans la fosse, les gens qui sautent comme nous sont clairsemés, mais heureusement, quand il s’agit de reprendre en cœur « Take Me » sur le morceau The Ride l’assemblée y met de la voix. Nous étions quelques un.e.s à avoir fait de la route, spécifiquement pour soutenir nos musiciennes préférées ce soir et nous hurlons de toutes nos forces quand Gabbie (guitare et chant) nous demande « Qui nous avait déjà vues en concert avant ? » Mais il faut reconnaître que les nouveaux arrivants sont bien présents et font globalement plus de bruit que nous quand elle demande « Qui nous voit ce soir pour la première fois ?« .

MADAM à l’Olympia le 11 octobre 2025 © Pierre Sopor

Quelques soucis de volume sonore indépendants des compétences de Roxane, la super technicienne son de MADAM, nous permettent d’évaluer la force de frappe d’Anais à la batterie qui résonne alors au dessus du reste. Le set s’achève sur Dance qui fait la part belle à Marine, sa basse, son sourire lumineux et ses mouvements chaloupés. À peine arrivées, les voilà déjà sorties de scène, les 25 minutes nous ont semblé en durer 5, tout au plus. Habitué.e.s à voir MADAM en concert nous pourrions même énumérer les morceaux qui ont manqué ce soir, mais nous préférons nous concentrer sur les applaudissements d’une assemblée conquise par la prestation de nos chouchoutes.

Les Tambours du Bronx

Le bar sert vite, mais les 15 minutes de changement de plateau nous ont à peine laissé le temps de partager une bière avec les copains, nous manquons de peu l’entrée en scène des Tambours du Bronx. Neuf bidons métalliques se font marteler sous les coups d’autant de percussionnistes et créent une résonance entre eux pour offrir une texture de rythmiques particulièrement puissante. Cet ensemble est augmenté de deux guitares, une basse, Franky Costanza à la batterie, Renato Di Folco et Vincent Portal aux voix et Arco Trauma aux machines. Au vu de la surface défoncée des fûts dès le début du concert, on se demande quelle est la durée moyenne de survie de ceux-ci (nos recherches futures nous orienteront vers une durée de 2 à 4 prestations). Ce soir, une mailloche rend l’âme rapidement et est aussitôt remplacée sans impacter la qualité de la performance. La majorité du set propose des compositions personnelles du groupe, mais leur reprise de Refuse/Resist – Roots Bloody Roots de Sepultura fait monter l’ambiance d’un cran.

Les Tambours du Bronx à l’Olympia le 11 octobre 2025 © Pierre Sopor

La plupart des morceaux interprétés ce soir sont extraits des deux albums les plus récents, Evilution (2023) et The Wild Pack (sorti il y a quelques semaines, le 25 septembre), mais les fans de longue date sont heureux de retrouver le morceau Mirage éternel sorti en 2018. Dans le dernier tiers du set, le nombre de bidons et de percussionnistes est porté à 11 pour deux morceaux dédiés aux percussions métalliques, l’essence même des Tambour du Bronx, avec Extreme et Jungle Jazz. Le set s’achève sur Am I Dead Enough et son petit wall of death dans lequel on reconnait des personnages déguisés en ours ou en Minions.

Sidilarsen

Bien que la formation existe depuis 28 ans, nous avons découvert Sidilarsen assez récemment, pendant le confinement, à un moment ou David (une des deux voix du projet) était très actif sur son compte Instagram et nous avait donné envie d’aller découvrir sa musique. Nous gardons un excellent souvenir de notre premier concert avec eux au Kreiz y fest, le 27 mai 2023, par lequel ils avaient enflammé le public en moins de 30 secondes. Ce soir à l’Olympia, nous vivons notre troisième concert en leur compagnie, le premier en salle. Les membres du groupe nous inspirent une grande sympathie et nous sommes curieux.ses de les revoir sans pour autant avoir d’attente particulière.

Smack My Bitch Up résonne en intro du concert. Un morceau de 1997, l’année de formation de Sidilarsen et pour le coup Prodigy, nous les écoutions aussi à cette époque là. Ce point commun, bien qu’il réunisse un bon nombre d’entre nous de la même génération, éveille peut-être inconsciemment un nouvel élan d’affection dans nos cœurs. En fond de scène, brille l’emblème du groupe inspiré du tire bouchon de Gaulle présent sur plusieurs pochettes de leurs précédents albums. Pour la sortie de leur dernier disque Que la lumière soit, ils ont repris ce symbole en version stylisée et lui offrent une place de choix dans leur scénographie comme sur leurs articles de merchandising.

La scène se baigne d’une atmosphère bleue, alors que Comme on vibre entame le set, on comprend rapidement qu’un soin tout particulier est apporté aux lumières pour ce spectacle. La couleur rouge domine sur Intox et l’emblème se mue en croix alors que David choisit pour ses interventions des mots qui invitent à se laisser porter dans l’instant « Allez lâche toi, tu peux bouger comme tu veux ». Nous ressentons moins le brasier que les précédentes fois où nous avions vu le groupe en festival, l’excitation que nous avions connue précédemment laisse place à la fascination et à l’envie de saisir chaque détail du show. Bien qu’il y ait toujours des gens avides de pogo et wall of death dans le pit au devant de la scène (et on aime ça, les gens qui animent la fosse !), la majorité du public semble plutôt attentive.

L’assemblée est chaleureuse et respectueuse dans l’ensemble, même s’il y a toujours un mec relou pour s’énerver sur des jeunes qui sautent juste devant lui et lui retombent par erreur sur les pieds alors qu’il lui suffirait de reculer d’un mètre pour être tranquille. Comme un clin d’œil de la vie, ceci concorde avec le moment choisi par David pour évoquer le fait que « ce sont souvent les hommes qui choisissent la violence, qu’il ressent le respect et l’esprit bienveillant de l’Olympia » avant de lancer le morceau Adelphité qui fait aussi un beau clin d’oeil au t-shirt marqué « we should all be feminist » de Benjamin B (guitare et chant). Notre bonhomme grognon semble avoir enfin compris qu’en fosse, il lui suffit de changer de place pour ne plus se faire bousculer.


Bien que notre nature profonde soit plutôt de planer dans les airs, On revient sur terre le temps de la chanson du même nom qui prône la reconnexion au réel dans un monde où le virtuel occupe une place bien trop importante. Un faisceau de lumière claire met en valeur alternativement David et Benjamin, les deux chanteurs, à mesure qu’ils se répondent les couplets qui énumèrent les catégories de personnes invitées à se reconnecter entre elles et à la terre. On ne peut s’empêcher de penser à la référence biblique Que la lumière soit, titre du dernier album mais ce sont bien des humains au sens bienveillant et généreux du terme qui sont baignés de lumière sur scène ce soir et nous offrent un moment de communion des plus exaltant.

Sidilarsen à l’Olympia le 11 octobre 2025 © Pierre Sopor

Une ambiance verte imprègne l’espace tandis que l’on se convainc que Le meilleur est à venir. Pour nous le meilleur est la venue de Gabbie pour chanter Back to Basics en souvenir de la tournée tourbus que MADAM avait partagé avec le groupe en fin d’année 2024. Le très attendu On va tous crever est présenté par David comme un morceau traitant d’un thème qui met tous les humains à égalité dans un monde qui nous divise et de conclure ensuite « ça fait du bien de crever ensemble ». Sabash, ancien guitariste de Sidilarsen, reprend du service sur le morceau La Fibre et une pensée est adressée à Julien et Sam, respectivement ancien bassiste et ancien batteur. Les Tambours du Bronx ramènent leurs bidons sur scène pour un final sur Des milliards et son refrain « Tant que l’humain s’adresse à l’homme, nous sommes des milliards contre une élite, impossible qu’ils nous évitent » repris en chœur par un public qui voudrait faire durer ce moment à l’infini.

Comme c’est souvent le cas dans les salles parisiennes, on nous presse de quitter les lieux immédiatement après la fin du show, nous privant de l’instant de recueillement que l’on aime s’offrir après un concert riche en émotions et en surprises comme celui que nous venons de vivre. Nous sommes arrivé.e.s curieux.ses, nous repartons exalté.e.s pas ce moment empreint de générosité, de combativité et d’une certaine magie portée par de magnifiques lumières.

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Nous remercions très sincèrement Pierre Sopor et Verdammnis Magazine pour les photos d’illustration de cet article.