Hier soir, Zaz a transformé l’Olympia en refuge de lumière, au cours d’une soirée pleine de vérité, de douceur et d’émotions brutes, où chaque chanson semblait nous murmurer qu’on peut renaître sans renier ses failles

On s’approche de l’Olympia comme on revient vers un endroit qu’on connaît déjà, mais qui surprend toujours. Le nom de Zaz brille en rouge sur la façade et on sent, rien qu’en levant les yeux, que la soirée aura quelque chose de doux et d’un peu électrique. À l’intérieur, le concert est assis, ce qui étonne d’abord, mais l’ambiance qui s’installe rappelle un cabaret tendre, un lieu où l’on vient vraiment écouter. Chacun semble prêt à recevoir ce que l’artiste va déposer là, après son voyage intime dans Sains et saufs.

Le nom de Zaz sur la façade l’Olympia, le 03 décembre 2025.

Gildas en ouverture

On attrape les dix dernières minutes de Gildaa. Juste assez pour sentir ce mélange de mystère et de douceur qui la suit partout. Sa présence flotte, étrange et familière à la fois, comme un pont entre plusieurs mondes. On se souvient alors de Rock en Seine, de son aura particulière, et on comprend pourquoi les iNOUïS du Printemps de Bourges l’ont récompensée. Avant de quitter la scène, elle glisse un mot sur son concert à la Cigale du 28 mai 2025. Puis le rideau tombe et l’entracte commence.

Gildaa en première partie de Zaz à l’Olympia, le 03 décembre 2025.

Une entrée douce et courageuse 

Puis Zaz apparaît. Pas dans un grand effet de lumière, mais dans un geste simple. Une caméra dans une main, un micro dans l’autre, comme si elle sortait d’un lieu à part. L’écran géant montre son visage de très près, et la salle entière se sent tout à coup invitée dans son souffle. Elle rejoint ses quatre musiciens ( contrebasse, guitare, piano, batterie) comme on retrouve une petite famille de route. Et la soirée s’ouvre avec « Je pardonne ». Une chanson douce, courageuse, où l’on sent qu’elle revient dépouillée du reste. Elle chante pour laisser respirer ce qui faisait mal, pour arrêter de remuer les couteaux dans ses plaies. Les mots sont de Noé Preszow, mais l’histoire, elle, est bien à elle : les jugements, les moqueries, l’exposition trop forte, tout ce qui l’a blessée mais qu’elle transforme en douceur plutôt qu’en colère.

Dans sa longue robe noire, elle glisse dans un décor de rideaux rouges ou verts, comme un cabaret réinventé. Et quelque chose se dépose quand elle dit : « Ma réponse à la noirceur du monde sera toujours la joie, et j’y travaille tous les jours. » On sent que toute la soirée tiendra sur cette phrase. Elle chante alors « Mon sourire », où elle raconte comment elle a choisi de se reconstruire, de devenir responsable de sa propre lumière. La salle est assise, mais dès la troisième chanson, tout le monde se lève sans réfléchir. L’énergie circule, simple et chaude.

Puis viennent les accents espagnols de « Qué Vendra ». Elle disparaît quelques secondes, revient en pantalon noir et petite chemise pour « La flamme ». Elle confie son amour pour le jazz. À ce moment-là, on comprend que ce concert n’est pas juste un alignement de titres, mais aussi une traversée, une vie racontée par ses musiques.

Moment suspendu & invités

Les chansons s’enchaînent comme des morceaux de souvenirs : « Les passants », « Comme ci comme ça », « Paris sera toujours Paris », « J’imagine que tu sais ». Puis l’atmosphère change, on le sent dans l’air, dans les épaules de la salle qui se rapprochent. Zaz entame « Au pays des merveilles ». Une chanson sur les addictions, sur ce faux paradis qui détruit plus qu’il ne sauve. L’auteur de ces lignes sent l’émotion monter. Il sait d’où il revient. Il pense à la crise, à l’hôpital, au moment où cette même chanson l’a presque fait basculer… puis, plus tard, l’a sauvé. Et tout à coup, on comprend ce qu’elle fait vraiment : elle ne recouvre pas les cicatrices. Elle les éclaire, juste assez pour qu’on se rappelle qu’on a survécu.

Puis Noé Preszow la rejoint. Ils chantent « Que des liens » (écrit en mémoire du papa de Zaz) assis en bord de scène, comme deux confidences qui se répondent. Le moment est grave, doux, presque fragile. On entend dans leurs voix le poids de l’amour, du manque, de ce qui reste après une perte. Raphaël arrive ensuite pour « Une passerelle vers la mer ». Une chanson de transmission, d’héritage intérieur. La scène prend l’allure d’un petit film, où le temps ralentit et où la musique parle à la place des gestes.

Les classiques qui rassemblent

Zaz n’oublie jamais d’où elle vient. Elle retourne vers ces chansons qui ont accompagné tant de vies : « On ira », « Si jamais j’oublie ». Et quand elle commence « Éblouie par la nuit », la salle bascule.Un silence tombe, épais, beau. Tout le monde retient le même souffle, et la chanson devient presque sacrée. L’ovation qui suit parle d’elle-même. Elle glisse ensuite vers « La vie en rose », qu’elle ravive sans jamais la trahir. Et puis vient « Je veux ». La chanson qui a tout lancé. La salle entière se lève, chante, applaudit comme si elle voulait rendre à Zaz toute la lumière qu’elle a donnée ce soir-là.

Ce soir là, l’Olympia n’a pas simplement applaudi Zaz, il a accueilli une femme revenue de ses ombres, une femme qui avance désormais avec une lumière qu’elle ne brandit pas comme un étendard mais qu’elle porte à hauteur de cœur, assez haut pour éclairer, assez doux pour apaiser. Et oui, elle a ébloui l’Olympia, mais d’une lumière qui soigne, pas d’une lumière qui aveugle.