Neil Young vient de retirer son catalogue de Spotify.
Neil Young est sans doute l’un des chanteurs du rock plus célèbres et respectés. Il était connu grâce au succès planétaire de l’album Harvest et sa participation au super groupe Crosby, Still, Nash and Young. Devenu un vieil hippy dans les années 80, il est relancé par l’album Rust never sleep et son hommage aux punks Hey, Hey My, My. Il devient le parrain du Grunge, Kurt Cubain meurt en citant une de ses chansons et il enregistre Mirror Ball, autre excellent album avec Pearl Jam.
Il a expliqué pourquoi il souhaitait quitter Spotify. La plate-forme musicale a passé un contrat de plus de 100 millions de dollars pour publier les podcasts de Joe Rogan. Celui ci a publié un enregistrement déconseillant le vaccin contre le Covid. Ce podcast a fait l’objet d’une protestation par 200 médecins qui ont demandé le retrait de cet enregistrement par Spotify.
Neil Young a de bonnes raisons pour être sensible aux problèmes médicaux. Il a été atteint étant jeune par la poliomyélite (une autre maladie à virus), et en a gardé des séquelles. Il a fait des crises d’épilepsie. Sa fille en fait aussi, ses deux fils sont atteints d’informité motrice. Il aura consacré une partie de sa vie à se soigner et à soigner ses enfants.
Neil Young a donc écrit dans une lettre ouverte, depuis retirée de son site : « Je fais cela parce que Spotify diffuse de fausses informations sur les vaccins – causant potentiellement la mort de ceux qui croient à la désinformation qu’ils diffusent »… «Je veux que vous fassiez savoir à Spotify dès AUJOURD’HUI que je veux que toute ma musique soit retirée de leur plate-forme. Ils peuvent avoir Rogan ou Young. Pas les deux. »
Depuis il a mis sa menace à exécution et effectué ce retrait. Il a été suivi par quelques artistes amis, Jony Mitchell, Graham Nash.
Spotify s’est retrouvé très emmerdé par cette prise de position inattendue. D’un coté il a un contrat avec Jo Rogan, qui génère de substantiels profits grâce aux millions d’écoutes. Il est aujourd’hui l’animateur le plus écouté sur Spotify. Mais, ce commentateur de combats violents invite des intervenants anti-woke, anti-vax. Il fait de Spotify un vecteur d’information des suprématistes blancs.
D’autre part, un début de désabonnement est apparu, de la part de jeunes. La plate-forme a réagi en annonçant qu’elle s’efforcera de combattre la désinformation. Jo Rogan lui même a promis d’équilibrer ses interventions en donnant la parole à des pro-vaccination.
On peut être ou ne pas être d’accord avec Neil Young, être anti ou pro-vaccin. Mais au moins reconnaissons qu’il croit encore que ses chansons ont un sens et qu’on ne peut pas tout se permettre avec. Nous sommes en un temps où les vieilles gloires négocient toutes leurs droits. Bob Dylan, ancien chantre de la contre-culture et Prix Nobel de littérature vient de négocier ses droits d’auteur pour une somme estimée à 500 millions de dollars, et ses droits d’enregistrement pour 300 millions. Bruce Springsteen, David Crosby, David Bowie ont fait de même. Neil Young lui même a vendu une partie de son catalogue.
Mais en abandonnant Spotify, il abandonne une partie importante de ses revenus. Le geste n’est donc neutre. En 2015 il avait déjà retiré ses chansons de Spotify pour des questions de qualité musicale, pour finalement revenir quand il a compris que c’était là que les jeunes écoutaient ses chansons. Mais il croit encore que ses textes veulent dire quelque chose, qu’il faut les écouter et pas seulement les entendre entre une publicité et un intervenant raciste ou complotiste.
Et quelque part, qu’il reste quelques utopistes est rassurant. [1]
Plus d’infos
Vous trouverez le catalogue de Neil Young sur les plates-formes sauf Spotify.
[1] Pour écrire cette chronique je me suis appuyé sur les assez nombreux articles publiés sur le sujet par le Monde et les Echos, pas forcement accessibles aux non-abonnés. Il y a eu aussi une chronique par France Culture. L’article Wikipédia sur le chanteur est aussi très complet.
Gros client de Neil Young je ne peux que vous remercier pour cet article.
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