Sept titres comme autant de paysages intérieurs, voilà ce que propose Savanah à travers son nouvel EP Désillusions, à écouter les yeux fermés, le cœur ouvert. 

Il y a chez Savanah cette manière unique de parler du trouble comme d’une caresse, et sa musique a ce pouvoir rare de suspendre le temps, de rendre la mélancolie douce, presque réconfortante. Son nouvel EP, Désillusions, en est la preuve la plus éclatante, il s’écoute comme une confidence à voix basse, un entre-deux où le flou devient refuge.

Neuf mois seulement après Céleste, elle nous offre sept chansons portées par une sensibilité à fleur de peau, où chaque note cherche un peu de lumière dans la brume. C’est un disque qu’on écoute comme on entrouvre une fenêtre au petit matin, entre lumière et brouillard.

Savanah (c): Cécile André

Une poésie du flou

« Je ne rêve plus » envoyé en éclaireur le mois dernier, ouvre l’EP comme une incantation. La voix de Savanah, mêlée à celle de Camille Lucas, s’enlace autour d’un refrain qui revient, s’impose, jusqu’à l’obsession. On y perçoit une fièvre douce, un abandon lucide. « Ce titre m’a fait sortir des sentiers battus », confiait-elle récemment, et c’est exactement ce qu’on ressent : un souffle neuf, un mouvement intérieur vers quelque chose de plus libre.

Plus loin, « Les Doutes » s’ouvre comme un souffle intime, l’artiste y dépose les questionnements et les blessures partagées avec sa sœur, cette complicité silencieuse et télépathique qui les lie. Un morceau stellaire, où l’amour inconditionnel devient lumière dans les zones d’ombre de l’âme. « Aéroport (LAX) » prend son envol, fuit vers un ailleurs, le regard perdu dans le ciel, tandis que « Intérieur Jour » nous ramène à la douceur fragile d’une chambre d’enfant, fragment de souvenirs suspendus. La nuit new-yorkaise de « Ce n’était pas moi » réinvente Dylan en français, dans un souffle délicat qui semble retenir le temps.

Et puis « 30 ans », que l’on connaît déjà, résonne comme une confession apaisée, avant la dernière étreinte de « Désillusions », portée par une nappe instrumentale et la voix de Marilyn Monroe qui se demande : « Est-ce que je suis vraiment heureuse dans la vie ? ». Un morceau qui devient un refuge pour les âmes songeuses, un câlin musical tendre et réconfortant.

Une étreinte sonore

Sous la direction d’H-Burns et les arrangements vaporeux de Benjamin Lanz (Sufjan Stevens, The National, Taylor Swift), Désillusions se déploie comme une brume légère. Tout y respire la délicatesse, une manière d’émouvoir sans jamais appuyer, et où chaque morceau s’installe doucement, comme une main posée sur l’épaule. On y retrouve cette chaleur feutrée, presque consolante, qui traverse tout le disque et lui donne cette aura de rêve éveillé.

Savanah poursuit sa route, discrète mais lumineuse, en construisant pas à pas un univers d’une rare cohérence. Et nous, on continue de la suivre, heureux témoins de ce doux vertige qu’elle sait si bien transformer en musique.