De mercredi à vendredi dernier, le quartier de Pigalle à paris a vécu au rythme de la 10ème édition du Mama festival et des jeunes talents de sa programmation à l’image de Pongo, Bandit Bandit, Alice et Moi, Hervé et bien d’autres. Retour sur cet événement.

Le Mama est généralement l’un des viviers pour les artistes de demain, l’une des scènes incontournables en ce début d’automne à paris. Le cœur de Pigalle est pris d’assaut par une foule de badauds entre pros qui ne passent pas inaperçus avec leurs badges autour du cou et les simples festivaliers, il y a du beau monde. Et ce ne sont pas les caprices de la météo qui freinera les ardeurs du public, étant donné que tout se passe en intérieur, dans plusieurs salles mythiques du quartier.

Un bel espace pour découvrir les nouveaux talents 

Durant trois jours et trois nuits, les salles de Pigalle seront investies par des conférences et de dizaines de concerts. Malheureusement nous n’aurons pas le temps d’assister aux conférences qui se déroulent généralement en journée, le festival ayant lieu en pleine semaine, ce n’est pas évident de jongler avec le boulot.

Notre attention étant focalisée sur les jeunes artistes et groupes qui investissent les différentes salles de Pigalle-Montmartre dans le 18ème arrondissement parisien. Le moment constitue souvent une porte d’entrée vers l’international pour ces jeunes artistes qui ont plus que besoin de visibilité, dans un secteur de plus en plus concurrentiel et hermétique.

Nous avons déniché quelques artistes parmi le lot qu’offrait le festival, dont on n’a pas fini d’entendre parler.

Mercredi : soirée pluvieuse, soirée heureuse ?

La Machine du Moulin Rouge, l’une des salles accueillant les différents concerts du Mama festival

Il pleut sur Pigalle, pas des cordes, mais ça mouille et c’est armés de leurs parapluies ou manteaux à capuches, que le public se faufile entre les touristes qui n’ont d’yeux que pour la Machine du Moulin Rouge, vers les différentes salles. Pour nous ça sera justement la machine du Moulin Rouge qui nous fait face, n’ayant pas prévu de parapluie, c’est au pas de charge qu’on le rejoindra. A l’intérieur ce n’est pas une machine, mais un four où il faut vite se débarrasser du trop-plein de vêtements qu’on a sur soi, avant de rejoindre le Central ou la Chaufferie, où les artistes se produiront.

Les « Inouïs » chauffent la Machine

Silly Boy Blue, Mama festival 2019.
Silly Boy Blue, Mama festival 2019.

La scène de la chaufferie du moulin Rouge accueille les lauréats des Inouïs de la dernière édition du Printemps de Bourges et c’est à Silly Boy Blue, la gagnante du grand prix, que revient l’honneur d’ouvrir le bal. Elle se trouve déjà sur scène à notre arrivée dix marches sous terre. La salle est bondée ou étroite on a du mal à cerner, ceci est dit il y a du monde jusqu’aux marches qui deviennent très vite impraticables.

Auteur d’un premier EP quatre titres « But You will » sorti il y a bientôt un an, la jeune artiste puisera dans ce dernier pour entretenir le public durant quarante-cinq minutes. Un entretien où elle nous parlera à la « You’re cool », du nom du titre qui se trouve à la fin de son EP, l’un des premiers morceaux qu’elle a composée après Cécilia. Tout y passe, ses désillusions et ses erreurs dans une pop qui se veut mélancolique et ténébreuse. Une belle entrée en matière pour embrasser la suite.

Le Parfum de Di#se

Di#se, Mama Festival 2019.
Di#se, Mama Festival 2019.

Di#se prendra le relais quinze minutes plus tard, le jeune rappeur vient présenter au public du Mama son premier album « Parfum » le 4 octobre dernier, avant un concert prévu à La Maroquinerie le 19 mars 2020. Il rendra un hommage appuyé à sa mère, à qui est dédié le titre « Visage », avant de faire sauter les digues de la chaufferie au son de ses envolés parfumées. Celui qui a reçu le Prix des Inouïs au dernier Printemps de Bourges, démontre qu’il n’est pas arrivé là par hasard et son nouvel album que vous pouvez retrouver ici en est la preuve.

On fera un tour de l’autre côté sur la scène du Central où NSDOS aka Kirikoo Des entretien le public avec sa nouvelle création où chaque mouvement de son corps influe sur les effets du son. Il laissera la place à l’artiste Camerounais Blick Bassy qui a consacré les titres de son dernier album à l’ancien leader camerounais Um Nyobè, assassiné par l’armée française pendant la période coloniale.

Morgane Imbeaud, une Amazone attachante

Morgane Imbeaud, Mama festival 2019.
Morgane Imbeaud, Mama festival 2019.

On était tellement pressés d’arriver à l’heure au Bus Palladium pour le concert de Hervé, qu’on s’est trompé sur l’horaire de passage. Un mal pour un bien puisqu’on a fait la connaissance de la douce Morgane Imbeaud.

Auteur d’un récent single sobrement intitulé « Amazone », disponible depuis le 27 septembre, Morgane en profitera pour nous présenter quelques morceaux de son prochain album annoncé pour 2020. Celle qui a pour deuxième passion la photo, nous fera passer un bon quart d’heure. C’est aussi ça le Mama, de belles découvertes imprévues.

Hervé le mélancolique

Hervé, Mama festival 2019.
Hervé, Mama festival 2019.

Il y a tellement eu d’occasions manquées cet été qu’il n’était pas question qu’on se loupe encore une fois. Enfin une occasion de voir le jeune « Cœur Poids Plume » Hervé et d’écouter les titres de son « Mélancolique FC » sorti le 17 mai dernier et dont on est fan. Un Ep six titres dont on peut ressentir l’influence de grands noms de la chanson française tels Alain Bashung à qui il a rendu hommage en reprenant « la peur des mots » dans une version bouleversante vers la fin du show.Avant son concert prévu à la Maroquinerie le 19 mai 2020 pour souffler la première bougie de son EP et celui déjà Sold Out prévu aux Etoiles le 04 novembre prochain, c’est donc au Bus Palladium que le jeune artiste a rendez-vous ce soir.

La salle qui est pourtant grande parait tout d’un coup trop étroite pour accueillir le public qui semble s’être passé le mot pour tous se retrouver serrer les uns contre les autres pour cet instant. Sur la scène, dans son tee-shirt blanc sans petits pois noirs, Hervé apostrophe le public dans « Dis-moi toi » avec une gestuelle qui n’est pas sans rappeler celle de son pote d’Eddy de Pretto. Toujours en mouvement, crâne rasé à la militaire, il nous fera voyager léger comme un « Coeur Poids Plume » qu’il joue avec énergie et fierté, qu’on a du mal à se séparer une fois venue l’heure de se dire adieu.

Une présence scénique derrière son « Va piano » et les nerfs à vifs qui trahissent mal les émotions d’un être mélancolique, qui rêvait d’embrasser la carrière de footballeur. Une frustration qui lui permettra de fonder son propre club « Mélancolique FC » et d’agir en défenseur central quand il s’agit de porter ses couleurs.

Les mille et une nuits de Mauvais œil

Le groupe Mauvais Oeil, Mama festival 2019.
Le groupe Mauvais Oeil, Mama festival 2019.

Pour bien débuter la soirée, nous avons rendez-vous au Backstage, la scène qui se trouve derrière le O’Sullivans à Pigalle pour une Excursion à Constantine en Algérie, sur invitation du duo Mauvais œil qui nous jettera un mauvais sort. La salle grouille de monde quelques minutes avant le début du concert, les instruments sont déjà bien en place et n’attendent plus de résonner sous la pression de leurs valeureux maitres.

C’est sur la sensualité de « Mes nuits de Velours » que le show est lancé avec Sarah Ben Abdallah au micro, la même qui a récemment posé sa voix sur l’album « Mystère » de La Femme. Avec elle ce soir son acolyte Alexis, multi-instrumentiste à la guitare et Diego,le nouveau venu à la batterie que la ferveur du public ne semble pas troubler dans la maitrise de ses baguettes. Avec ses faux airs de vendredi sur mer et son déhanché volcanique Sarah prendra position dans le non moins féministe « Powers to the womens », qui est un hommage à peine voilé au courage des femmes qui se battent au quotidien pour faire entendre leurs voix.

Le premier single « Constantine » résonne dans la salle pour un voyage sur les terres de Sarah. La route sera longue jusqu’à Constantine, mais le rêve est permis en l’espace de trois minutes. Un jour on ira bien à Constantine. Le clip de ce dernier sortait le 14 mars 2019, en plein contestation du pouvoir par la jeunesse Algérienne.

La salle est comble et semble entrainée par les rythmes colorés venus d’ailleurs, de Sam Salomé à Asah en passant par Mektoub, on est sous le charme et on ne peut s’empêcher d’imiter les coups de rein de Sarah. Le voyage s’achèvera par la pop entraînante de Afrita, mêlant rythmes orientaux que le groupe vient d’ailleurs de sortir en clip et qui vaut le détour.

Irma illumine la cigale 

Irma, Mama festival 2019.
Irma, Mama festival 2019.

La jeune artiste d’origine Camerounaise à l’univers Soul, était la première à monter sur scène ce soir à la Cigale, dans une programmation où les femmes tiennent le haut de la marche. Nous arriverons vingt minutes avant la fin de son passage, mais quel passage ? Un show devant une salle bondée à souhait qui exulte sa joie d’être bien au chaud dans cette salle, à l’abris de la pluie qui menace à l’extérieur.

Welcome to house of Kuduru 

Pongo, Mama festival 2019.
Pongo, Mama festival 2019.

C’était l’une des révélations de l’année 2018, la portugaise d’origine Angolaise Pongo a mis le feu à la Cigale avec son Kuduro d’enfer. L’artiste qu’on ne présente plus et que la presse a surnommé la reine du Kuduro a retourné la salle à peine entrée sur scène avec les titres de son dernier album « Baia », qui signifie « Danse » en portugais, et de la danse il en sera question tout au long de ce concert. Tambulaya, son premier single qui a fait beaucoup de bruits se chargera de mettre le public dans l’ambiance quo rythmera cette soirée.

Choral a un côté eucharistique qui vous plonge dans l’ambiance des églises gospel qu’on trouve à Harlem. Tandis que Kassussa fait bouger toute la salle dans une chorégraphie bien imposée, « La cigale faites du bruit » ordonne la reine dans sa tenue or blingbling, avant de se lancer dans un duel de coupé décalé couplé de Kuduro avec ses danseurs.

C’est le moment de plonger la salle dans une ambiance mélancolique avec Kazula, son single dans lequel elle évoque un amour brisé. Même si la chanson paraît triste, elle nous demande de ne pas s’en faire et de toujours garder la tête haute. Et c’est justement la tête haute qu’elle nous offrira une parenthèse festive en fin de concert avec le tube Wengue Wengue du groupe portugais Buraka Som Sistema, dans lequel elle a fait ses preuves quand elle n’avait que 16 ans. Elle invitera quelques fans sur scène pour final explosif sur des rythmes endiablés.

Mirage club au Fgo

le groupe Mirage Club, Mama festival 2019.
le groupe Mirage Club, Mama festival 2019.

C’est par le Fgo-Barbara que la soirée commence, on arrive juste à temps pour le début du concert de Mirage Club, un groupe qu’on ne connaissait pas et qui va nous surprendre par sa performance. Ils sont trois sur scène, mais ils n’ont pas de batteur comme nous le fera d’ailleurs remarquer notre voisin qui se plaint de l’absence de batteurs dans les nouveaux groupes. Heureusement qu’il ne sera pas lourd durant le concert et semble même apprécier, vu qu’il applaudit à chaque fois plus que tout le monde. Bref, le groupe Mirage Club est un trio qui vient de sortir un nouvel single « Communication » et a joué sur la grande scène Séraucourt du Printemps de Bourges le 19 avril dernier.

C’est sur Droppin my bones qu’ils lancent les hostilités en faisant résonner leurs instruments. Ils nous feront le plaisir de jouer deux morceaux qui sortiront à la fin de cette année Tropical Z et Cream, que le public prend un réel plaisir à apprécier dans une parfaite osmose. La « Communication » semble avoir été établit jusqu’à la fin puisque c’est par leur nouveau single, diffusé sur les ondes de la BBC en avril dernier et dont le clip est disponible depuis le 9 mai 2019, qu’ils prendront congé du public sous une salve d’applaudissements.

Des bandits en furie à la Boule Noire

Le duo Bandit Bandit au Mama Festival 2019.
Le duo Bandit Bandit au Mama Festival 2019.

C’était un braquage parfaitement assuré par des maitres en la matière, puisqu’il s’agissait du jeune groupe de rock français Bandit Bandit, qui se produisait sur la scène de la Boule Noire vendredi dernier, en ouverture de la dernière soirée du Mama festival. Maeva et Hugo qui viennent de sortir un 1er EP éponyme de cinq titres, étaient accompagnés sur scène du bassiste Ariel et du batteur Antony. Dans un show magistralement orchestré, le quatuor nous fera voyager aux rythmes des guitares bien envoyées. Débuté dans le Néan, en référence au titre qui ouvre le concert, la salle vibrera dans la frénésie de ce rock garage qui tabasse, tout en faisant du bien. On finira bien par atteindre une autre Dimension dès le deuxième morceau, pour un Friday Night Fever qui démarre sous de meilleurs hospices.

Les deux voix se lancent dans un rock n’roll sensuel sur Maux, leur premier single chanté en partie en français. Un choix qui opère son petit charme dans l’assistance lorsque Maeva se rapproche de la fosse pour communier avec le public.

La fin n’est plus loin et Hugo en profite pour sortir son Tzoras (sorte de guitare grecque) qui donne un mélange de musique psychédélique et orientale. Vivement l’album

La dualité fait âme d’Alice et Moi

Alice et Moi, Mama festival 2019.

Ça sera notre dernier concert de la soirée, on airait tellement aimé resté pour profiter des autres concerts de la soirée, mais entre celui qui avait un vol tôt le lendemain et l’autre qui était attendu ailleurs, s’annonçait compliqué. Mais il n’était pas question de s’en aller sans voir Alice et Moi, donc l’horaire de passage (19h55) au Cuba café nous arrangeait bien.

Seule fille au milieu d’une bande de mecs, dans laquelle on retrouve Dany Terreur avec qui elle est en featuring sur son titre “Bébé c’est l’enfer“. Elle entretiendra la salle sur l’histoire des deux « moi » qui cohabitent en elle et qu’elle aimerait bien exorciser ce soir en notre présence. Ce qui la pousse a implorer le public de la filmer pendant qu’elle chante sur scène, faisant ainsi référence au titre éponyme de son premier EP « filme moi », disponible depuis le 27 octobre 2017. Une voix douce et féminine qui n’a pas besoin de trop en faire trop pour se faire entendre.

« Est-ce qu’il y a des gens ici qui aime le rap ? » lance-t-elle à la cantonade avant de nous expliquer le pourquoi de cette question en musique, elle qui voudrait « sortir avec un rappeur ». Avant de nous chanter en acoustique, une chanson qu’elle n’a jamais jouée et qui sera peut-être sur son prochain album. Elle reproduira au creux de sa main, le fameux dessin d’un œil que l’on peut apercevoir dans ses clips ou sur ses photos ( au nom de l’oeil dans la peau).

À la fin du concert, le public poussera la chansonnette sur son nouveau single « j’en ai rien à faire », sorti le 19 juin dernier. Une sorte d’éloge au je m’en foutisme ou au qu’en dira-t-on qui nous empêche de faire certaines choses et surtout ce que les autres peuvent penser de nous. La salle se déchaînera particulièrement sur cette dernière chanson, qui en plus d’être entraînante, permet de se défouler et de lâcher prise. On s’en ira confiant, certain de ne plus laisser le regard des autres nous dicter notre conduite.

Bilan

ô Mama festival, que ce fut agréable ce 10ème anniversaire et surtout riche en découvertes. Malgré une météo un peu capricieuse, le public à répondu présent massivement, puisqu’ils étaient quelques 5850 curieux (+6%) à se précipiter dans les différentes salles de Pigalle-Montmartre pour acclamer les 175 artistes programmé(e)s. Un engouement qui présage un futur radieux pour le Mama qui s’impose comme un rendez-vous incontournables de l’automne à Paris. Rendez-vous du 14 au 16 octobre 2020, pour une 11ème édition, on l’espère, encore plus généreuse.