Il est enfin là Pour la beauté du geste, le premier album folk du jeune artiste Baptiste Ventadour. Il nous a reçu dans les coulisses de l’Olympia la semaine dernière pour en parler
Si on avait dit au jeune Baptiste Ventadour, ancien chanteur de rue, qu’il allait voir son nom inscrit en lettres rouge un jour sur la façade de la mythique salle de spectacle qu’est l’Olympia, qui a vu défiler les plus grandes stars depuis 1954, lui-même n’aurait par cru. Et pourtant, à seulement 23 ans, il a foulé pour la première fois cette scène emblématique qui reste unique pour un artiste, grâce à l’opportunité que lui a offert Anne Sila, d’assurer la première partie de son concert le 12 mai dernier.
Une première partie que le jeune prodige à la voix de bluesman éraillée a assuré comme un grand devant une salle comble qu’il a plongé dans une mélancolie douce, avec ses anciens succès et quelques extraits de son premier album Pour la beauté du geste, qui sort ce vendredi 20 mai. Armé de son inséparable guitare à douze cordes, il jouera ainsi « Dans la rue », le titre écrit par Grand Corps Malade et qui fait allusion à son ancienne vie de chanteur de rue. Ou encore le très bel hymne « À cette étoile », avec lequel il a conclu sa prestation ce soir là sous un tonnerre d’applaudissements.
Après une période trouble jalonnée par des confinements à répétition qui l’ont éloigné de la scène, Baptiste Ventadour a repris sa tournée à travers la France avec un arrêt prévu au théâtre les Étoiles à paris le 11 octobre prochain. Il nous a reçu dans les coulisses de l’Olympia la semaine dernière et ce n’était pas seulement pour parler de La beauté du geste, mais aussi des raisons qui le poussent à s’accrocher à sa passion.
Après un premier EP et plusieurs singles, ton premier album « Pour la beauté du geste » sort enfin ce 20 mai. A la veille de cette sortie comment te sens-tu ?
Je l’appréhende et en même temps j’ai vachement hâte, parce que c’est un peu le sentiment que tout artiste peut à ce moment là, tu as envie que ça marche, tu as envie de le partager à plus de monde. En même temps c’est possible que ce soit une balle perdue, plein de possibilités. Mais en tout cas je suis fière de cet album, j’ai juste envie de le sortir, envie de le partager à ceux qui m’écoutent un petit peu, il y en a peu, mais essayez de faire un peu plus.
Tu as profité de la période du confinement pour composer de nouvelles chansons ?
Le confinement en lui-même ne m’a pas inspiré, j’avais plein de petits textes que j’ai pu approfondir. Quand tu te retrouves tout seul avec rien à faire, tu es juste dans une phase d’introspection parce que tu n’as rien d’autre à faire et tu réfléchis. Peut être de ce point de vue la çà peut être inspirant, mais le confinement ne m’a pas directement inspiré. J’ai fait beaucoup de rencontres pendant cette période, comme celle avec grand corps malade qui a composé un titre.
Pourquoi tu as choisi d’enregistrer ce nouveau projet dans un studio à Bruxelles ?
Parce qu’il y avait de supers réalisateurs, c’est le groupe Delta, leur studio est à Bruxelles. Celui qui a mixé l’album c’est Lionel Capouyas qui a bossé avec Bigflo & Oli, Boulevard des airs… il est super fort en mixe et c’est lui qui a mixé l’album, du coup on est allé là-bas dans un studio qui leur appartient.
Tu laisses parler ta fibre écologique dans « Que reste-t-il ? », selon toi le monde c’est foutu pour la planète ?
J’espère pas… mais en fait je pense que oui, en même temps je n’ai pas d’autre chose à faire que d’espérer que non. Je pense que si vraiment le monde cour à sa perte, il faut espérer faire le plus possible de choses pour que ce ne soit pas le cas. Après j’ai fait une chanson, c’est rien du tout, mais j’avais envie d’en parler parce c’est un sujet qui m’angoissait. C’est tellement général et important et je trouvais ça bizarre qu’on en parle pas beaucoup, c’est quand même un truc qui concerne la fin du monde. Pas grand chose de pire que ça. Le temps et le fait que les choses s’arrêtent un moment ça me fait toujours peur. J’écris en fonction de mes angoisses.
Quand on ne s’aime plus c’est joli de se dire « j’espère qu’on se reverra un jour ».
Baptiste Ventadour
On n’est pas loin des Grands Boulevards, est-ce que ça ravive la douleur de cet amour perdu dont tu parles dans ton titre ?
Pour moi c’est pas vraiment une chanson d’amour triste, c’est plus une rupture dans ce qu’elle a de plus belle. Plutôt que de dire que « je ne te reverrai jamais », je dis « j’espère que je te verrai dans 20 ans et on rira bien de ce qu’on a vécu », tout ce qu’on peut tirer de positif dans une séparation. Quand on ne s’aime plus c’est joli de se dire « j’espère qu’on se reverra un jour ». Le mal des Grands Boulevards parle de deux personnes qui se séparent, une qui veut aller vers la campagne et l’autre qui veut rester en ville.
Tu utilises beaucoup d’instruments à cordes dans cet album, le banjo, la mandoline …Ta guitare douze cordes
Les instruments à cordes m’ont toujours accompagnés depuis que j’ai commencé la guitare. J’ai fait du bonjo, du ukulélé… et ça a un peu influencé ce que je fais parce que ce sont les instruments avec lesquels je suis le plus à l’aise. Et en même temps j’adore la musique folk, le blues des années 60 aux usa, c’est vraiment une musique que j’aime beaucoup.
Comment tu as écrit tes chansons ? Qu’est-ce qui t’a inspiré ? La crise ?
Je pense qu’il y a des gens qui peut-être se disent je suis inspiré par tel événement ou autre, mais moi j’ai plus l’impression que c’est un instinct, j’ai une idée d’un coup ou une phrase dans la tête parce que je suis dans un état particulier. En général quand je compose une chanson je déroule un fil, tu as une seule phrase ensuite tu titres le fil et tu essaies de l’agrémenter, trouver un joli refrain et c’est très instinctif, il n’y a pas une chose en particulier qui m’inspire. Au final c’est marrant parce que je me suis rendu compte qu’il y avait un peu de sujets récurrents comme le temps qui passe qu’on retrouve un peu partout dans l’album.
Et comment s’est passé la rencontre avec Grand Corps Malade ?
Mon manager connaît sa manageuse, moi j’adore Grand Corps Malade du coup je lui avait envoyé des sons pour qu’il écoute afin qu’on puisse travailler ensemble sur un texte. Il a écouté, il a bien aimé, Il a bien et on s’est rencontré. La chanson elle parle de la rue dont j’ai une expérience parce que j’ai commencé à chanter dans la rue, lui en avait une autre. On n’avait pas la même vision. Lui il a commencé dans la rue mais c’était plus cité, quand il a commencé le slam il jouait vachement dans les bars, il y avait un côté street mais ça n’a rien à voir avec ce que je faisais. Moi je jouais pour les passants lui c’était autre chose. Du coup on avait une vision différente et on a décidé d’écrire là-dessus.
Tu as à peine 23 ans, c’est plutôt jeune, comment tu fais pour ne pas perdre pied dans ce milieu qui peut être cruel ?
Je me focalise vraiment sur la musique, après il peut y a avoir des moments d’angoisse où tu te dis « j’espère que j’en vivrais dix ans de plus ». C’est pas le fait que ça marche ou pas, ou de vouloir devenir a tout prix une star. Je veux juste continuer à faire de la musique et être sûr et certain que je pourrais vivre de ma passion.
A part Grand corps malade, avec qui tu te sens le plus proche dans ce milieu et avec qui tu aimerais travailler un jour ?
Sur la scène française il y’en a plein : Pomme, Ben Mazué, Gaëtan Roussel… après j’ai plein d’amis que j’adore Claudio Capéo, Gauvin Sers… c’est vrai que si je devais choisir j’hésiterais, c’est des gens que j’aime beaucoup.
Est-ce que la crise t’a fait peur ? Tu as eu peur que ça ne reparte pas ?
Franchement au niveau de la crise en elle-même ça va, je me suis dit « putain c’est cool, il n’y a plus aucun humain à l’extérieur, ça doit faire du bien… »
Mais ça a quand même impacté le milieu de la musique qui est le tien…
Par rapport à la musique oui. Ça fait bizarre, ça m’a vraiment impacté et après je ne me suis pas dit que ça ne repartirai jamais. Quand on a été confiné je devais jouer au Trianon en première partie, je suis rentré à Clermont, on a bu un verre et à minuit tout était fermé. Tu ne sais pas combien de temps ça va durer à ce moment là, je crois que je n’étais pas le seul à m’inquiéter pour la reprise de la musique. C’était vraiment contraignant, pas que pour nous.
Pourquoi avoir intitulé ton projet « Pour la beauté du geste » ?
Parce que c’est un album que j’ai fait très instinctivement, c’est aussi le premier album et puis je veux en faire d’autres. Pour la beauté du geste parce que les chansons se sont faites dans un élan général, mais de façon très instinctive. C’est le premier album, je le considère comme une carte de visite parce que comme je disais tout à l’heure, je suis vraiment un passionné de musique.
Pour moi l’Olympia c’est vraiment une salle mythique, je ne m’imaginais pas pouvoir jouer là un jour.
Baptiste Ventadour
Qu’est-ce que ça te fait de jouer pour la première fois ce soir sur la mythique scène de l’Olympia ?
Ça fait bizarre, même de le dire. Pour moi l’Olympia c’est vraiment une salle mythique, je ne m’imaginais pas pouvoir jouer là un jour. Après je suis en première partie mais c’est dingue de voir la salle, je n’étais jamais venu et en plus je ne suis pas d’ici, l’Olympia ça résonnait un peu comme un truc lointain. Après je suis pressé de reprendre la tournée et d’enchaîner.
Au niveau de la reprise comment ça se passe avec le public ? Tu sens une envie de leur côté ?
Je trouve que ça se voit qu’il manquait de culture depuis un moment, même nous, nous sommes super fières de revenir. Et là j’ai l’impression que tout le monde est en mode wahou… c’est différent, c’est le but des spectacles aussi. Je sens quand même qu’il y a une petite énergie en plus.
Plus d’infos
Pour la beauté du geste, le premier album de Baptiste Ventadour est disponible sur toutes les plateformes.