Avec l’Énigme de la chambre 622, Joël Dicker nous emmène dans les Alpes Suisses, au cœur d’un Palace, une nuit de décembre. Une enquête de police qui n’a pas abouti, c’est sans comp – ter sur un rebondissement…

Les reports de publication pour cause de confinement ont affecté les maisons d’édition qui misent sur « les poids-lourds » pour relancer leur économie. Très attendu comme à chaque annonce maintenant depuis plu- sieurs années, il l’était d’autant plus. En effet, le romancier figure parmi les écrivains de best-seller qui font recette.

Incontournable de cette année 2020

C’est l’effervescence du côté des libraires avec la rentrée littéraire. Rien de nouveau si ce n’est que cette année fut marquée par une période particulière et mondialement chamboulée. Covid oblige, pas de présentation en librairies, la plupart des maisons d’éditions sont passées par des conférences en ligne. Pourtant, le lancement retardé du nou- veau livre de Joël Dicker, n’a fait que hisser celui-ci parmi les meilleurs dans sa catégorie. Sortie repoussée comme d’autres et ce pour une raison supplémentaire qui tient à cœur à l’auteur : pouvoir échanger avec ses lec- teurs, lui qui a besoin pour écrire de s’isoler sur un long terme.

Depuis près de 10 ans, Guillaume Musso régnait sur le secteur, l’édition est en émoi

Si vous n’avez pas encore lu L’énigme de la Chambre 622, il est encore temps car c’est une valeur sûre de la fiction polar. Le roman s’est déjà vendu à 265 000 exemplaires en France et déloge, pour l’heure, de la première place Guillaume Musso – dont le dernier livre est sorti au même moment – , titrait Le Parisien en date du 16 juillet der- nier. « … depuis 1 mois maintenant, c’est le roman de l’écrivain suisse qui est le plus vendu en France. » – assu- rait encore le quotidien. Ainsi, au classement français GfK – Livres Hebdo, il se tient en 3e position actuellement. Rien de surprenant à le voir conseillé aux côtés de Musso et Bernard Minier.

Impossible de le lâcher : captivant, il vous garde en haleine jusque tard dans la nuit

L’anglicisme « page turner » [1], qualifie le genre de livre pour lequel vous tournez les pages – 576, en l’occur- rence – afin de découvrir ce qui va se passer. Pas étonnant que La vérité sur l’affaire Harry Quebert, un de ses précédents livres sorti en 2012, se trouve adapté il y a de ça deux années pour une série télévisée réalisée par Jean- Jacques Annaud avec Patrick Dempsey dans le rôle principal. Il faut remarquer que le jeune auteur de 34 ans a un sens inné du suspens qu’il maîtrise savamment par une construction, toujours familière, qui serpente habilement en fil rouge jusqu’au dénouement. Chaque fin de chapitre apporte un nouveau sursaut au scénario.

Joël Dicker crée donc la sensation avec son dernier roman, mais n’en est pas à son coup d’essai

Traduit en 40 languesson livre La vérité sur l’affaire Harry Quebert qui l’a fait découvrir au grand publics’est vu élire parmi Les 101 romans préférés des lecteurs du journal Le Monde. Il lui a valu, entre-autres, le titre de ro- man francophone le plus vendu de la dernière décennie et le grand prix de l’Académie française. Il n’a, dès lors, cessé de publier. Au titre de livre le plus vendu en France en 2018, tous genres confondus, on retrouve La Dispari- tion de Stéphanie Mailer.

Contexte particulier…

Celui qui avait déclaré dès les débuts de la carrière de l’auteur qu’il aurait un « très grand succès », son éditeur Bernard de Fallois [2], est décédé en 2018. Il était le doyen de l’édition encore en activité depuis la mort de Mau- rice Nadeau. Son dernier protégé entame alors l’écriture de ce livre et décide de lui rendre hommage. L’auteur af- firme que c’est lui qui l’a fait découvrir et a changé le cours de sa vie. Il le considérait comme un ami, un maître exigeant et ouvert d’esprit avec lequel il a beaucoup appris.

Captiver le lecteur, cultiver son imaginaire

Dans les précédents romans, le décor était planté aux États- Unis. Ici, nous sommes plongés au cœur de la Suisse et à Ge- nève plus particulièrement. C’est un pays que l’auteur connaît bien puisqu’il y vit et en est originaire. Il en ressort une des- cription crédible des lieux et une narration au service du texte autant que de l’histoire. Citant son éditeur au fil du roman : « Selon Bernard, un « grand roman », c’est un tableau. Un monde qui s’offre au lecteur qui va se laisser happer par cette immense illusion ». Un mécanisme bien rodé qui nous permet de vivre les évènements successifs et de sentir presque de manière palpable, les éléments du décor, grâce aux détails qu’il apporte avec minutie.

Un mort, il y en a toujours au moins un

L’univers dépeint est celui du monde du pouvoir, la trame se déroule dans le milieu des banques privées. Il est question de travestissements, de fausses identités, d’illusions… Qui est vraiment qui, est la question dont le lecteur n’aura la réponse qu’à la toute fin. Les allers-retours entre passé et présent – une de ses marques de fabrique – en font un roman au long cours construit à la manière des feuilletons d’autrefois, s’éta- lant sur une trentaine d’années. Encore une réussite que l’on dévore. Pour Joël Dicker, fiction et réalité sont souvent très proches. Il s’inspire de ce qui l’entoure. Donnons-lui donc le temps dont il a besoin en patientant avec l’espoir de revoir à nouveau projeté sur écran cette nouvelle intrigue.

[1] La Commission d’enrichissement de la langue française recommande de ne pas employer cette tournure mais plutôt le mot « accrolivre », la formule «livre pop-up» ou « livre en relief ».

[2] Ami et éditeur de Georges Simenon – romans policiers des Maigret – , également de Marcel Pagnol, il était connu en tant que spécialiste de l’œuvre de Marcel Proust. Un clin d’œil de Dicker y fait d’ailleurs réfé – rence : le majordome de l’un de ses personnages, s’appelle Alfred Agostinelli, comme le secrétaire de Proust.

L’Énigme de la Chambre 622 de Joel Dicker aux Éditions de Fallois (576 pages) Publication : 27 mai 2020 – Prix : 23 €, en version ebook à 16,99 €