Entre deux dates de sa tournée d’été, Alice Animal a pris le temps de répondre à nos questions autour de son album dernier Tandem et bien plus encore.
Après nous avoir donné un aperçu avec son single « Tes éléphants roses », paru en novembre 2020, l’électrisante Alice Animal a dévoilé, à la fin du mois de mai dernier, son album Tandem pour notre plus grand plaisir. Depuis le début de l’été, avec la reprise des concerts, la jeune femme a pu retrouver la scène, accompagnée de sa guitare électrique. En toute gentillesse l’auteure, compositrice et interprète qui dirige son propre label a réservé une place dans son planning très chargé pour répondre en toute sincérité à nos questions et nous éclairer sur son opus.
Ton deuxième album Tandem est sorti le 28 mai dernier. Il s’agit du titre d’une des chansons du disque. Pourquoi avoir choisi ce titre parmi les autres pour illustrer un album que tu présentes, à contrario, en solo ?
« Tandem » c’est soi + l’autre, c’est être ensemble pour avancer. À l’heure où les relations pâtissent d’un éloignement physique certain, je trouvais important de donner à mon album la couleur du « collectif », l’idée de « faire ensemble », et d’ailleurs, parfois, même quand on est seul, on est plusieurs à l’intérieur. C’est la chanson de l’album que je trouve la plus enjouée, et c’est cette dynamique que je souhaitais qu’on retienne avant tout. Je n’ai pas l’impression de présenter un album « solo ». Une super équipe m’a accompagnée.
Par ailleurs, j’ai du mal à considérer mon album « Tandem » comme un deuxième album puisque c’est réellement le premier album que je sors et défends officiellement, alors que « Théogonie », est plus confidentiel, uniquement disponible sur mon site www.aliceanimal.com ou à la fin des concerts.
Avant de devenir Alice Animal, blonde platine et Rock n’ Roll, tu te faisais appeler Aless, brune présentant un style plus pop. Pourquoi ce changement radical, tant pour la musique que pour le physique ? Une sorte de remise à zéro des compteurs, un nouveau départ ? Un événement de ta vie en est il à l’origine ? Un déclic ?
Ma vie et ma musique sont étroitement liées, comme beaucoup d’artistes je crois. En effet, il y a plusieurs évènements qui m’ont naturellement fait prendre ce tournant serré et global. Il y a eu une rencontre avec Alban Theuillon qui a toujours travaillé étroitement avec les artistes d’un point de vue plutôt technique et créatif (studios et matériels de musique). Il m’a proposé de faire un bout de chemin ensemble, en montant notre label « Alessandra Records » afin de produire les albums qui allaient naître, sans devoir attendre quoi que ce soit de l’extérieur. Le début de notre collaboration s’est fait le jour où j’ai troqué ma guitare folk pour une guitare électrique (une belle Duesenberg bleue paillettes). Ça été un sacré changement.
Le nom de scène et le look ont permis de donner une couleur (blonde platine) à ce nouveau départ. J’avais envie de m’amuser sur scène, être une créature qui, je m’en suis rapidement rendue compte, m’a permis de lâcher le quotidien dans les loges pour être un autre visage, plus sauvage et …. étrangement plus proche de moi.
Ton premier album Théogonie sorti en 2017, existe uniquement en format physique, vendu à un nombre limité d’exemplaires. As-tu prévu de le rendre disponible en streaming ?
Pour le moment, il n’y a que la chanson « Cythère » qui est disponible en streaming et en clip (réalisé par Thomas Guerigen). Il n’est pas encore prévu de rendre la totalité de l’album disponible en streaming. Il existe dans une belle version CD-livret Deluxe et en Vinyle Picture !
Les États Unis sont très présents dans ton album. Y as-tu déjà voyagé ? Si oui, est-ce une destination de prédilection pour toi ? Une importante source d’inspiration ?
C’est une source d’inspiration, j’ai plus de références musicales anglo-saxonnes que françaises. J’ai déjà été à Chicago, à New York mais sur le territoire américain c’est plus le Québec que j’ai exploré. Les Etats Unis ne sont pas non plus une obsession. Il y a la chanson « Finir à L.A » qui est clairement localisée là-bas mais il me semble que c’est tout.
Comment est née l’idée de l’album Tandem ? Quelles sont tes inspirations (voire influences), ton cheminement pour créer cet album ?
Au départ, il n’y a que des chansons, donc des fragments d’un album qui finiront par former un tout et par porter un nom, une couleur, un visuel. À ce moment-là, lorsque rien n’est vraiment concret, lorsque tout est encore possible (même la possibilité de se perdre), il y a une envie. Une envie d’enregistrer un album, voire un besoin. L’album est un palier important pour avancer. C’est une sorte d’introspection, un scanner pour se présenter dans toute la richesse de ses émotions. Il s’agit de se livrer, sans voile, c’est un cheminement plus ou moins long qui prend différentes formes en fonction des personnes avec lesquelles on décide de travailler.
Là, il y a déjà une deuxième étape dans le processus : rencontrer les bonnes personnes, celles qui parleront le même langage, avec lesquelles on va se comprendre sans trop de mots, à l’instinct. En effet, les références, influences, inspirations sont importantes à partager avec l’équipe pour avancer dans une même direction. Avec Vincent Fauchet, qui a réalisé l’album, nous parlions de « groupes à guitare » : The Black Keys, The White Stripes, Anna Calvi (« Hunter »), Feist (Pleasure), QOTSA (album « …Like Clockwork »), My Brightest Diamond (album « Bring Me The Workhorse »)…. Et bien d’autres. Et puis, plus on avance plus on oublie les références parce qu’une couleur plus personnelle émerge et prend sa place.
Quand tu composes, ce sont les mots ou la musique qui viennent en premier ? As-tu un rituel de création ? Des heures du jour ou de la nuit qui te rendent plus prolifique ?
Aucune habitude, aucun rituel, aucune formule magique pour créer. Chaque chanson a son histoire, son processus de création qui lui est propre. La musique me vient plus facilement que les mots. Question de pudeur sûrement. Et je n’ai plus aucun mal à envisager de travailler en co-création avec d’autres auteurs-compositeurs, on s’amuse encore plus à plusieurs.
Quel moment préfères-tu dans la vie d’artiste ? La composition ou l’interprétation ?
Les deux ! Tout se nourrit. C’est tout ça qui est jouissif, l’un sans l’autre n’a pas de raison d’être. J’aime composer, dans le but d’aller sur scène et j’aime aller sur scène dans le but de partager mes compositions et mon univers avec le public. Chaque étape de travail, création ou bien jouer sur scène, demande un état d’esprit très différent. Il y a des périodes plus intérieures, intimes et d’autres pendant lesquelles c’est le moment de rugir ! Ce rythme me semble naturel.
De nos jours, beaucoup d’artistes indépendants sortent leur album uniquement au format numérique, pour limiter les frais de production. Il te tenait à cœur de sortir ce deuxième album en vinyle et en CD. Quelle est la raison de ce choix ? Pourquoi l’objet a-t-il tant d’importance à tes yeux ?
Je vais vous avouer que je ne me fais pas vraiment au numérique… Oui l’objet a de l’importance pour moi, j’aime le voir et le toucher. J’aimais fouiller dans la discothèque de mes parents, choisir le bon album avant de passer un chouette moment. Mon rapport à la musique a beaucoup changé quand il y a eu cette transition numérique, et je crois que je ne m’en suis pas remise…. ne plus avoir l’objet sous la main me donnait moins envie d’écouter un artiste. J’aime voir et toucher l’objet, l’ouvrir, le découvrir. Et je me dis que pas mal de gens doivent réagir comme moi.
Tu as créé ton propre label Alessandra Records, il t’a permis de sortir tes deux albums. Quels sont les avantages à sortir ses disques sur son propre label ? Envisages-tu de produire d’autres artistes sous ce label ?
Les avantages à créer son propre label, c’est qu’on gère tout de A à Z, (ça peut aussi être un inconvénient). On choisit nos partenaires, on choisit comment on veut travailler, il n’y a pas cette frustration d’être dans l’attente des autres. Par-contre, il faut être à fond tout le temps et sur tous les plans. Il faut réussir à s’occuper de domaines très différents les uns des autres.
Nous détenons avec notre label les masters de nos albums. Nous y voyons clair sur tout ce qui est revenus, ce qui n’était pas le cas pour les générations précédentes qui ne s’occupaient que rarement de leur business. Et puis, il y a un côté cocon, maison avec son propre label. C’était une évidence à ce moment là, en 2016. Maintenant tout peut évoluer. Mais je suis déjà heureuse d’avoir enregistré ces deux albums avec « Alessandra Records ». M’occuper déjà de mon projet est chronophage, je ne pourrais pas travailler pour d’autres projets pour le moment. Par contre, je suis toujours ouverte pour parler de mon expérience avec d’autres artistes.
Dans ce nouvel album Tandem quel est le titre auquel tu es la plus attachée ? Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
C’est comme si on demandait à une maman lequel de ses enfants elle préfère, vous êtes durs vous ! 😉 Je les aime tous pour leurs différences. Je vais être sympa, je vais en faire émerger une, mais ça ne veut pas dire que je suis moins attachée aux autres. La dernière « On n’a qu’une vie » était l’occasion de chanter avec Kent une chanson qui a quelque chose d’universel et que je vois comme un point d’orgue de l’album. J’aime beaucoup la chanter sur scène parce qu’elle pose une ambiance très dense. J’ai hâte que Kent m’accompagne sur scène pour la chanter en tandem !
Dans la chanson « Tes éléphants roses », tu cites « Tu m’aimes trop ». Comment peut-on être « trop aimer? »
Il y a plein de manières d’aimer, parfois ça peut être toxique, étouffant, parfois ça peut faire du mal, parfois le terme « trop » signifie que ça va trop loin et que certaines limites ont été franchies. Dans la chanson, le flou autour de cette phrase peut prendre de multiples visages. Je fais quand même allusion aux drogues, en invitant la personne à ne pas me confondre avec addiction malsaine.
Bien que l’on parle beaucoup de parité dans l’état actuel de notre société, le monde du rock reste majoritairement représenté par le sexe masculin. L’inspiration de la chanson « Mauvais garçon » vient-elle de là ?
Non pas précisément. C’est une chanson qui me permet de m’amuser, de lâcher le feu, et de dire que ce sujet n’en est pas un, enfin…. j’aimerais qu’il n’en soit pas un ! « Un peu fille, un peu garçon, je me fous de la question ».
Tu es très présente sur les réseaux sociaux, notamment à travers ce que tu nommes les « capsules ». Elles sont actuellement au nombre de 47. Peux-tu nous expliquer le concept ?
Au début du premier confinement, il y a un grand vide qui s’est créé, pour tout le monde. Je ne voulais pas me sentir en prison et j’ai utilisé la musique pour rester créative et au contact des gens. C’est un projet que j’avais depuis longtemps mais je ne trouvais pas le temps de le mettre en place. Je partais de l’idée que lorsque je prends ma guitare il y a toujours une idée qui émerge, un riff, une mélodie, un son, et je me disais que tous ces fragments ne verraient peut-être jamais le jour parce qu’ils ne deviendraient pas une chanson ; j’ai eu envie de partager ça. J’ai un peu ralenti le tempo depuis la sortie de mon clip « Tandem » puis la sortie de l’album, mais je reprendrai lorsque le moment sera venu.
Quels sont tes projets pour la deuxième moitié de l’année 2021 ?
Il y a des concerts (voir sur le site www.aliceanimal.com), il y aura sûrement un troisième clip, la préparation d’une release party pour tout début 2022, oups…. J’en ai déjà trop dit ! Plein de belles choses à venir et j’ai hâte de partager tout ça !
Toute l’équipe de PhenixWebZine te remercie pour cette interview, nous te souhaitons une magnifique tournée avec des rencontres plus belles les unes que les autres.
Merci pour ces questions fort intéressantes ! J’espère que nous aurons l’occasion de nous croiser prochainement !
Merci pour cette très bonne interview !!
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