A la fin de la semaine, aux journées du patrimoine, nous irons voir ces villages que chante Brassens. Des guides nous expliqueront la beauté de ces paysages et nous gaveront d’anecdotes.
C’est vrai qu’ils sont plaisants tous ces petits villages
Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités
Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages,
Georges Brassens lui même était un monument de notre patrimoine. On a donné partout son nom à des écoles, des collèges, des lycées, des maisons de la culture ou des théâtres. Avec sa moustache, sa pipe, et sa guitare, il promène sa silhouette dans nos souvenirs. Son gout de l’adaptation de poèmes de Villon, Verlaine, Aragon, ou Banville le raccroche aux chefs d’oeuvre de la littérature française.
Mais le vieux Georges était-il si facile à récupérer ?
Avant lui, il n’y a guère de chanteur français à guitare. Les Piaf, Trenet, Tino Rossi, Mireille ou Jean Sablon s’accompagnaient ou étaient accompagnés par un piano. C’est le québécois Felix Leclerc qui ramène la guitare au début des années 50, avec le succès français de sa chanson « le petit bonheur ». Et le chanteur à guitare est d’abord une image de l’Americana, du country et du blues. Ce sont les Robert Johnson, les Woody Guthrie, les Pete Seeger qui les premiers enregistrent avec une guitare. Lorsque Jacques Grello conseille à George de s’accompagner à la guitare plutôt qu’au piano, c’est pour le moderniser plutôt que pour en faire une icône poussiéreuse.
Mais surtout il faut bien écouter ce que racontait cet anarcho-pacifiste. La suite de la chanson dit :
Ils n’ont qu’un seul point faible <les villages>, c’est d’être habités,
Et c’est d’être habités par des gens qui regardent
Le reste avec mépris du haut de leurs remparts.
La race des chauvins, des porteurs de cocardes,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part…
Maudits soient ces enfants de leur mère patrie
Empalés une fois pour toutes sur leur clocher
Qui vous montrent leurs tours, leurs musées, leur mairie
Vous font voir du pays natal jusqu’à loucher…
Mon Dieu qu’il ferait bon sur la terre des hommes
Si l’on n’y rencontrait cette race incongrue
Cette race importune et qui partout foisonne
La race des gens du terroir, des gens du cru.
Je ne crois pas qu’il sera facile à tous les Zemmour, Onfray, et autres Le Pen de récupérer ce poète.
Mais ce qui me rassure, c’est qu’il y a des admirateurs de Brassens parmi tous ces français qui prient dans une église, un temple, une synagogue, tournés vers la Mecque, ou l’autel des ancêtres, ceux qui refusent de prier au nom de la laïcité, ceux qui ressuscitent le chamanisme ou le druidisme.
Tout cela fait d’excellents français disait Maurice Chevalier. Et que le patrimoine leur rappelle que la guerre est moche et qu’il vaut mieux s’aimer.
Plus d’infos
La chanson « la ballade des gens qui sont nés quelque part » est écoutable sur la plupart des plates-formes (Spotify, Deezer…).
Les commentaires sont fermés.