Pour son 4ème album Factory, composé en partie durant le confinement, le duo No Money Kids est allé chercher de l’inspiration du côté de l’usine et compte bien le défendre sur scène afin effacer le sentiment d’inachevé de la précédente tournée. Rencontre !
Félix Kazablanca (chant/guitare) et Jean-Marc Pelatan (basse/batterie/machine) forment le duo rock No Money Kids qui a dévoilé vendredi 26 novembre, son 4ème album Factory. Un opus à travers lequel le tandem aborde le passé ouvrier de la famille de Félix et dans lequel chaque chanson comporte de petites ébauches d’un vrai ouvrier glissé par JM. La pochette de ce nouvel opus nous donne une idée sur l’ambiance sombre et industrielle qui rythmera ses 12 titres vertigineux.

Tandem aux influences sans frontières, qui cite autant The Kills que Robert Johnson en références, avec quatre albums et près de 300 concerts au compteur, No Money Kids n’est plus à présenter et ne fera qu’accroître son audience avec ce nouveau long-format. Avant de le défendre sur la scène du Trianon le 3 mars 2022, où les riffs de guitares et les basses promettent de résonner, le duo nous accordé un aparté il y a quelques jours à Paris, mais pas dans une usine !
Votre nouvel album Factory sort le 26 novembre, 12 titres électro blues de moins de 50 minutes de bonheur, composés dans l’intimité du confinement. On peut le qualifier de spécial pour vous ?
Félix : à bien des égards il est forcément spécial. Pour nous il est spécial parce que c’est notre 4ème album, du coup on avait envie de prendre plus de temps, de se laisser un peu le loisir de quelque part se concentrer sur ce qu’on avait réellement envie après toutes ces années de tournées. Là on voulait prendre le temps et il se trouve qu’à ce moment là il y a eu une pandémie. On a été forcé de le prendre ce temps, rien que pour ça il est particulier parce que ça a chambouler notre manière de chanter et de s’approprier nos chansons, parce qu’on avait pas de rapport direct avec le public. D’habitude on essaie toujours de préserver un lien qui fait qu’on ne se perd pas forcément, parce que quand on va sur scène on est obligé de défendre nos titres, d’être sincère et s’il n’y a pas de sincérité, on ne se rend pas compte des erreurs de choix artistiques. C’est vrai qu’on avait pas d’ancrage à ce niveau là et du coup il a fallu faire autrement.
Vous avez pris du recul avec le confinement pour réaliser ce 4ème album. Finalement C’était du pain béni pour vous ce temps d’arrêt ?
Félix : Je pense qu’il serait sortir sûrement plus tôt, parce qu’on est un groupe de Live, du coup quand on ne prend pas la route, on a un peu l’impression de se perdre. Après c’est dur de tabler sur quelque chose qui ne s’est pas fait. En gros pour nous le confinement a été d’un point de vue artistique une bonne chose parce que ça nous a permis de faire plein de choses auxquelles on n’avait pas le droit avant. Puisqu’on n’avait pas le loisir de s’arrêter autant et d’être concentré comme ça chez soi. C’était vraiment bénéfique.
JM : ça nous a presque permis d’oublier ce confinement parce que de toute façon quand tu travailles en studio t’es un peu confiné, et finalement là c’est devenu reglo et ça nous a fait passer un moment moins désagréable que prévu, le fait de faire un album ou alors de le digérer parce qu’il était déjà certainement fait.
Factory signifie usine en français, est-ce que c’est la que vous êtes allé chercher de l’inspiration pour ce nouveau projet ? Pourquoi l’avoir baptisé ainsi ?
Félix : quelque part c’est un non choix. Dès le premier album on a eu une manière d’écrire et de produire avec JM qui est très affilié à au personnage. L’idée était d’avoir un personnage par chanson et aussi il y avait la dimension d’hommage qui est aussi un peu comme file rouge dans notre manière d’écrire ou on parle souvent de personnes qu’on a rencontré. Et la il y avait vraiment une envie de parler d’un passé ouvrier. Toute ma famille a dû aller à l’usine et d’ailleurs pour agrémenter un peu ce discours on est allé enregistrer la journée de travail de mon cousin qui travaille encore à l’usine, du coup dans chaque chanson JM a glissé de petites ébauches d’un vrai ouvrier pour le coup.
JM : on s’en est servi même pour la production de l’album, sans être subliminal, par contre comme c’est sorti du contexte, on ne s’en rend pas compte. Mais il y a des timbres qui viennent directement de ses enregistrements et c’était très pour la profondeur du son, pour plein de choses. Ça nous a évité d’utiliser du matériel qu’on a l’habitude d’avoir.
C’est toujours le même processus créatif du départ entre vous ? C’est à dire Félix qui écrit les textes sans essayer de prendre position, toujours dans une position de témoignage ? Et JM toujours plus dans l’arrangement ?
Felix : On n’a pas envie d’affiliée No Money Kids a un militantisme où a une volonté de documentariser telle ou telle situation. On n’est pas là pour ça et on se rejoint sur le fait qu’on est un groupe de rock et notre première mission c’est de faire de la musique et de partager des sensations. Oui c’est toujours le même procédé.
Dans votre premier single « Crossroad » vous interrogez nos rapports aux écrans et dans « Brother », vous parodiez notre société de consommation à travers cet homme à la fois séduit et exaspéré. Notre modèle de société est dépassé ?
JM : dépassé ? Mais il est en destruction totale. Quelques uns résistent, mais les autres ils sont dépassés depuis très longtemps. Il va être reconstruit, mais avant la reconstruction il y a une destruction, on est au milieu. Ce qui n’est pas plus mal, ce qu’il va arriver va certainement être bien, mais pour le moment on est dans un petit creux vague, c’est normal, c’est de la gestation sociale.
C’est marrant si sur ce clip on y voit une critique de la consommation et de la surconsommation des écrans, j’espère que ça va être bientôt un reflet du passé. Pour le moment c’est du présent qui commence à passer. D’ailleurs, dernièrement on a vu que les gens regardent 30 minute en moins la télévision, donc tout le monde commence à prendre conscience et c’est plutôt pas mal. Nous on a surf pas sur la vague, mais on est dans ce creux et des photographies qu’on prend c’est celui d’un album, d’un état social aussi sans être journaliste parce que nous a rajouté de la poésie la dedans. C’est juste un sujet sans vouloir vraiment prendre l’émotion ou plutôt l’émotion transformée en musique. Forcément ça devient politique quelle soit bonne ou mauvaise.
C’est pas une façon de prendre position, le fait de trouver que la société part en perdition ?
Félix : forcément, nous on se permet de donner notre point de vue, après il y’a des choses qui sont différentes avec une démarche artistique qui est uniquement axée sur cette volonté de partager un message précis et militant dans le sens où nous aujourd’hui on n’a pas cette volonté de vouloir changer le système avec nos chansons. Ce qu’on veut nous, c’est juste montrer quels sont les affres du système et qu’est-ce qu’il faudrait faire pour les changer, mais on ne donne pas de solution, nous ne sommes pas là pour ça.
JM : à défaut de partager des prises de position on partage de la musique, ça on le depuis longtemps quelque soit l’état social. Après tu peux avoir de petits bribes de ce qui se passe dans la société. Les artistes qui me rappellent que le monde est degueulasse ça m’emmerde, je préfère ceux qui mettent le doigt où a fait mal. Après cette musique peut être inspirée par des conflits sociaux.
Les titres de l’album vous les avez écrit avant, pendant ou après le confinement ?
Félix : il y en a beaucoup qui ont été écrit avant. Dans les 12 titres qui sortent, on a dû en supprimer la moitié. Au début du confinement on avait la moitié de l’album et durant le confinement on a composé l’autre moitié.
Du coup il n’y a pas eu une grosse influence du confinement sur vos titres ?
Félix : non pas vraiment, par contre là où le confinement a vraiment fait son œuvre, c’est sur le prochain album. Comme on a pris l’usine au sens large comme point de départ, c’est vrai que comme disait JM, il y a un moment quand ta vie est marquée par les restrictions de libertés, la pandémie, par un état social qui peut se déliter…on vit aussi un moment de poésie. Quand on composait Factory, on avait trop la tête dans le guidon pour réaliser qu’on était en plein confinement.
Il y a trois ans, lors de notre dernière rencontre vous n’étiez pas opposés à un changement dans la configuration de votre groupe sur scène . Est-ce que cette idée a évolué ?
JM : c’est fait depuis un moment, vous le verrez au Trianon.
Félix : Du coup au Trianon on sera trois sur scène avec Greg Damson le batteur. Le confinement nous a aussi permis ça aussi, c’est à dire de travailler différemment avec quelqu’un d’autre. C’est vrai que après plusieurs années de tournée il a fallu réapprendre à jouer en trio.
Quel est votre ressenti, vous qui avez la chance de renouer avec la scène ?
Félix : ça se passe très bien, on sent que les gens ont envie de penser à autre chose et de faire la fête. Surtout au début quand ils ont réouvert et surtout les derniers festivals qu’on a fait, on sentait vraiment que les gens avaient envie de communier. Rien que de rencontrer les gens qu’on ne connaît pas au quotidien on sent qu’ils sont marqués par ça. Après je ne sais pas ce que ça donne sur les taux de fréquentation de salles de concerts, mais en tout cas nous ce qu’on a ressenti c’est que les gens étaient demandeur de ça.
En 2023 vous allez fêter vos dix ans de rencontre. Est-ce que vous avez prévu de marquer le coup par un 5ème album.
Félix : ah! C’est dur de répondre à ta question, ce qui est sur c’est qu’on marquera peut-être le coup, mais si on le fait c’est parce qu’on aura fini un processus créatif avant. On ne fera pas que pour ça. Tu viens de nous le rappeler, mais nous on avait même pas conscience (rire). Si on sort un album se sera un bel anniversaire. Nous l’album on le fait parce qu’on a envie de le faire et pas parce qu’il y a une date à fêter ou un élément particulier.
Comment s’entretient un duo ou chacun à sa propre personnalité et qui dure depuis dix ans ?
JM: plus facilement que quand il y a plus de monde, parce que le lien il est plus fort, les engueulades aussi. Mais il y a tellement plus de places, moins t’es plus il y a des places, donc ça va. Puis si ça explose il y en a que deux qui se séparent, quand on est trois ou quatre c’est plus de massacre.
Ce qui change aujourd’hui c’est uniquement la configuration sur scène, pas le processus créatif ?
Félix : le processus créatif ça reste nous deux, après forcément quand on travail avec quelqu’un ça nous amène aussi d’autres visions. Pour l’instant c’est ça et après on verra.
Après Rock en Seine, Art Rock.. quel festival ou salle vous fait rêver ?
Félix : en ligne de mire j’ai le Trianon pour plusieurs raisons, c’est une salle que j’adore. Depuis que je suis tout petit je pense à l’Olympia, je me disais quand je serai grand je ferai l’Olympia. En fait je me rends compte que tous les concerts que j’ai été voir à l’Olympia je n’ai pas très aimé le son. J’ai aimé le prestige du lieu, mais c’est pas une salle à laquelle je me suis attaché. Or le Trianon pour le coup j’ai vu vraiment beaucoup concerts et à chaque fois j’ai aimé cette salle.
Avec la reprise est-ce que vous ne trouvez pas dans une impasse avec tous les groupes qui reprennent en même temps ?
Félix : c’est compliqué, c’est l’entonnoir de la reprise, tout le monde est présent. Après on a la chance de ne pas être tout seul, on est plusieurs dans l’équipe, un manger, un éditeur, un tourneur … on a cette chance d’avoir cet entourage et encore plus.
Faut-il s’attendre à un nouveau clip pour célébrer la sortie de l’album ?
Félix : oui, il y a un nouveau single avec un clip qui s’appelle « Dear Friends » et qui sera dévoilé juste après la sortie de l’album histoire de ne pas le court-circuiter.
Plus d’infos
Factory, le nouvel album de No Money Kids est disponible sur toutes les plateformes.
La Release party aura lieu le 3 mars 2022 au Trianon. Billetterie ici
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