On s’est accordé une parenthèse avec Carole pelé au festival Chorus le mois dernier, l’occasion de revenir sur les projets de cette ex journaliste diplômée des beaux-arts de Paris

Diplômée des beaux-arts de Paris c’est la classe, ça présente bien sur le cv, mais pour Carole Pelé, ça ne suffisait pas, ni même la profession de journaliste reporter d’images qu’elle a exercé quelque temps. Elle qui a toujours rêvé de faire un métier artistique, s’est retrouvée dans la musique, cette activité culturelle qui consiste à combiner sons et silences au cours du temps. Ça sera son refuge, sa buée de sauvetage dans ce monde agité dont elle s’est sentie plusieurs fois en marge.

Exit donc la vie journaliste pour celle plus excitante et non moins compliquée de chanteuse qu’elle embrasse frontalement en dévoilant en 2018 son premier titre « Rena Plaza ». Celle qui jadis n’avait « R à raconter » ou encore « peur de (se) tromper », prend le ton de la confidence pour nous conter ses « Nuit(s) blanche(s) » dans un Premier EP autobiographique sorti en 2021. Mais de sa vie de journaliste reporter d’images et rédactrice, Carole a gardé le souci du détail, ce qui lui permet aujourd’hui de soigner autant la musique que l’image de ses chansons, à l’image de son dernier clip « Les mains dansent », qui parle de l’emprise toxique que l’autre peut exercer sur nous dans une relation amoureuse.

Après sa belle prestation en marge de la 34e édition du festival Chorus le mois dernier et avant la sortie de son nouveau projet prévue à l’automne prochain, Carole s’est confiée.

On se retrouve à la Seine Musicale, non loin de chez toi, pour le festival Chorus où tu es programmée en marge du Prix Chorus. Tu nous expliques ?

Carole Pelé : Je fais partie de l’accompagnement PAPA qui est une sélection du département des Hauts-de-Seine qui a lieu tous les ans. Cette année on a été trois projets accompagnés grâce au PAPA, on a accès à plusieurs choses dont l’opportunité de jouer à Chorus durant la journée de l’Emergence avec d’autres artistes qui concourent pour le Prix Chorus.

Je ne viens pas d’une famille d’artistes, je n’ai pas les codes ni les références, c’était plutôt de l’intuition.

Carole Pelé

Tu as un parcours plutôt atypique, diplômée des beaux-arts à paris, journaliste reporter d’images, et maintenant artiste musicienne ?

J’avais toujours rêvé de faire un métier artistique, mais je ne savais pas ce que c’était. Je ne viens pas d’une famille d’artistes, je n’ai pas les codes ni les références, c’était plutôt de l’intuition. Du coup j’ai fait journalisme, et en tant que journaliste je me suis spécialisée dans l’image et la télévision en tant que reporter d’images et rédactrice. Après j’ai passé le concours des beaux-arts et une fois après je me suis dit qu’il fallait que je trouve mon médium, je ne savais pas trop quoi. Je savais qu’il fallait que je fasse quelque chose avec ma voix, j’écrivais déjà. J’ai commencé à prendre un cours de chant, préparer ma première chanson. Ensuite on a fait la musique, on a organisé un petit concert, on a fait un premier clip et puis j’ai continué à tirer le fil vers mon premier EP.

Les beaux-arts c’était un plan b ou un choix réfléchi ?

J’ai vraiment choisi. Après la littérature, artistiquement, l’art plastique c’est la chose qui me faisait le plus vibrer depuis toujours et encore aujourd’hui. J’ai l’impression de me sentir réellement à ma place.

La musique te permet une liberté que tu ne trouvais dans le journalisme ?

C’est pas la même approche, c’est des métiers complètement différents. Après le fait d’avoir été journaliste, c’est quelque chose qui me pousse toujours à aller vers cette réflexion qui est de l’ordre du réel, du témoignage, de l’auto fiction, de la mémoire… ça influence beaucoup ma façon de faire, ça fait partie de moi et ça m’a construit. J’ai complètement choisi les Beaux-arts de mon plein gré, ça a été une chance immense pour moi de pouvoir rentrer dans cette école, c’était un rêve.

Tu dis dans une de tes chansons que tu avais peur de te tromper. Est-ce que cette peur t’habite encore aujourd’hui ?

La peur c’était de faire les choses au mauvais moment, c’était de savoir si la musique me correspondait vraiment. Pour moi c’est important de me poser des questions, de savoir pourquoi je suis là.

Aujourd’hui tu t’en poses encore ?

Ça a disparu, mais à une époque je me suis posée la question pour des raisons personnelles, si ça faisait partie de histoire ou si j’ai été influencée pour le faire. J’étais un peu entre les deux, mais aujourd’hui je ne me pose plus la question.

Il est en fait autobiographique ton projet ?

C’est totalement autobiographique. En l’occurrence l’histoire d’amour a été vécue et toutes les chansons ont une dimension autobiographique puisque ce sont les fragments de ma vie. J’essaie d’aller vers quelque chose qui est très direct, qui ne ment pas, parce que j’ai l’impression que c’est à travers cette vérité là que je vais réussir à toucher les autres. Les artistes qui m’ont fait vibrer m’ont transmis cette vérité.

Tu préfères te raconter toi que de raconter les autres ? Ou il arrivera un moment ou tu feras l’inverse ?

Je ne sais pas, je ne peux pas te dire. Pour l’instant ça parait peu probable que je raconte les histoires des autres, c’est plutôt ma propre histoire… »

La comparaison avec les autres elle est toujours là ?

Disons que quelque part elle est toujours là. Moi ça m’arrive vachement de me comparer aux autres, d’avoir des sentiments pas très beaux, de jalousie, d’envie … Mais il y a une chose que les beaux-arts m’ont inculqué, c’est que ça ne sert à rien de se comparer. Dans cette école on n’est pas dans la comparaison parce que chacun est tellement dans un processus de création qui est unique et qui lui appartient. Finalement la jalousie n’a pas lieu d’être.

La jalousie elle s’installe quand on n’est pas entre artistes. D’un produit à un autre, il peut y avoir de la jalousie, mais d’une œuvre à une autre c’est quelque chose d’impossible. Je ne pourrais pas comparer mon travail avec celui d’amis sculpteurs ou peintres. Entre artiste il n’y a pas vraiment de comparaison possible et donc de jalousie possible, chacun est dans sa voie.

Tu as l’impression d’être en compétition tout le temps ?

Oui ça m’arrive, mais j’essaie de ne pas trop y penser parce que c’est quelque chose de très dur, ça ne se voit pas ainsi, mais c’est pas évident.

T’es une écorchée vive! Dans « Biget » tu t’ouvres un peu plus, tu parles de ta naissance, de ta mère, c’est un titre assez personnel et fort

C’est quelque chose d’assez fort donc je n’en parle pas beaucoup, mais là c’était important d’en parler parce que c’est tellement consécutif de ma personnalité, le fait d’avoir vécu quelque chose d’intense, d’avoir échappé à la mort. C’est quelque chose qui a forgé mon caractère de battante, qui s’acharne. C’était important d’en parler et puis le clip c’était aussi l’occasion de faire quelque chose avec ma mère. Dans chaque clip j’essaie toujours de me mettre un défis. Là c’était une performance avec ma mère, je voulais vraiment que ce soit l’émotion qui soit au rendez-vous, mais aussi mêler ma famille.

Est-ce que tu dirais aujourd’hui que le fait de faire de la musique est une forme de thérapie pour toi ?

Complètement! Ça m’a guéri parce que pendant très longtemps, avant de choisir de me lancer dans l’art, je me sentais vraiment perdu. Je ne savais pas quel était le sens de ma vie. A partir du moment où j’ai entamée cette démarche artistique, j’ai senti que je commençais à aller mieux. Ça a été un processus assez long, mais aujourd’hui j’ai complètement dépassée cet état.

Parmi les artistes du moment, avec lequel souhaites-tu collaborer ?

J’adore Keith and pest qui pour moi est le top, Stromae, Chris and the queen. J’ai fait la 1ère partie de Terre noire que j’adore, Hervé aussi.

Sortir ton projet entre deux confinements ne t’a pas un peu fait peur ?

Non parce que je pense qu’il faut avancer, la vie continue, il ne faut pas non plus faire comme si le monde tournait en rond et qu’il n y avait pas de problème. J’étais plus d’avis d’avancer, je savais même qu’en sortant l’EP, derrière j’avais la perspective du 2ème EP que j’avais déjà en maquette. Finalement j’ai pris le pari de sortir tout ça pour continuer d’avancer en espérant qu’au sortir de la crise ça porte ses fruits. Si j’avais repoussé, je n’aurai pas pu faire ce que je fais aujourd’hui.

Plus d’infos

Premier EP, le premier EP de Carole Pelé est disponible sur toutes les plateformes.

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