Avec un record d’affluence de 150.000 festivaliers et un espace VIP décrié par une partie de la presse et des festivaliers en colère malgré un retour aux sources, la 18e édition de Rock en Seine aura fait parler d’elle
L’affiche était alléchante pour le grand retour de Rock en Seine au domaine national de Saint-Cloud du 25 au 28 août dernier. Idles, Arctic Monkeys, Nick Cave, Parcels, Tame Impala, Fontaines D.C…. Bref une programmation de 82 concerts pour un retour aux sources très rock et une fréquentation du public au rendez-vous avec 150.000 personnes sur 4 jours, dont 3 Sold Out. Une édition record qui s’est déroulée sous des conditions météorologiques d’exception et qui a confirmé la montée en puissance du festival.

Si cette édition fut une réussite, il n’en reste pas moins que la fosse VIP installée devant la grande scène, n’était pas du goût de tout le monde. La presse et le public avaient des mots assez durs dès le lendemain pour décrier cet espace où il fallait payer un peu plus cher pour y avoir accès. Une nouveauté du golden pit qui nous rapproche de plus en plus du système américain à la carte et nous éloigne des valeurs de partage et d’ouverture que sont censés véhiculer un festival. Espérant que ce système ne sera pas reconduit lors des prochaines éditions, retour sur ces 4 jours un peu mouvementés au Domaine national de Saint-Cloud.
Ouverture so British
Le rock est de retour au Domaine national de Saint-Cloud en ce premier jour de l’édition 2022 de Rock en Seine. Il faut dire qu’il y a bien longtemps que le festival francilien n’a pas proposé une affiche aussi rock, ce qui explique l’engouement du public dès le jeudi d’ouverture annoncé Sold Out depuis quelques semaines. Et pour cause, l’affiche du jour se veut So British avec des artistes comme l’excentrique anglais Yungblub qui a enflammé le public de la grande scène en fin d’après-midi ou encore le show à couper le souffle offert par le gang des cinq rockeurs irlandais Fontaines D.C sur la scène Cascade en début de soirée. Mais les attentes du public sont tournées vers les principales têtes d’affiche de cette journée d’ouverture les britanniques Idles et Arctic Monkeys.
Les premiers sont de retour à Rock en Seine après leur dernier passage en 2018 pour défendre leur 2e projet Joy as an act of resistence. Depuis, le groupe fondé à Bristol en 2019 a sorti deux autres albums, Ultra Mono (2020) et le dernier en date Crawler (2021) dont les titres seront majoritairement joués ce jour. Joe Talbot et sa bande sont accueillis en héros lorsqu’ils débarquent sur la grande scène pour 75 minutes de show durant lesquelles ils nous feront passer par toutes les émotions. De leur reprise foutraque de « All I want for Christmas is you » jusqu’au final sur « Danny Nedelkoa », en passant par une série de pogos, tout est réuni pour rendre ce moment magique.

Pour les second d’Arctic Monkeys, on a à peine le temps de se retourner qu’on se retrouve pris au piège de la foule compacte qui se dirige vers la grande scène. On tente tant bien que mal de quitter cette fosse que tout le monde convoite pour suivre le show sur l’un des côtés de la scène. C’est à ce moment-là que Alex Turner et ses copains débarquent sur scène au son de l’un de leurs plus grands tubes« Do I Wanna know », repris en chœur par tout le parc. Huit ans après leur premier passage à Rock en Seine, les anglais retrouvent leur public français dans une ambiance très nostalgique. On aurait aimé poursuivre la découverte de ce groupe qu’on connaissait peu, mais la piètre qualité du son de la grande scène a mis un frein brutal à notre envie. Tchao l’artiste !
Électro, rock & soul
Direction la scène Cascade dès notre arrivée le vendredi en fin d’après-midi, où le britannique James Blake est déjà sur scène. On a encore en souvenir son concert aux Nuits Sonores à lyon en 2019, qui nous avait complètement transportés. La recette n’a pas changé, mais le lieu ou l’horaire s’y prête peu, une programmation beaucoup plus tard pour ce style de musique aurait été préférable. Mais on ne boude pas notre plaisir pour profiter de ce voyage en compagnie d’un artiste à la bonhomie contagieuse. « Je me sens comme au Paradis » confesse l’anglais derrière son piano avant de nous filer les frissons avec son tube « Retrograde », jusqu’au final sur une reprise du titre « Godspeed » de Frank Ocean. Du James Blake comme on aime et qui salue timidement son public dans son ensemble vert pomme, avant de disparaître en backstages.

Sur la grande scène, c’est un autre voyage plein de douceur que nous offrent les trois londoniens du groupe London Grammar. « C’est la dernière fois qu’on joue cette tournée à Paris » annonce le groupe avant d’inviter le public à reprendre avec eux leur premier tube « Wasting my young years » dans une ambiance très nostalgique. A la fin de ce voyage, alors que le gros du festival convergeait vers la grande scène pour assister au live inoubliable de Nick Cave and the Bad Seeds, nous avons préféré passer la fin de soirée en compagnie de notre ténébreux Animal Triste comme nous vous le racontions ici.

Avec un 5e album à son actif moins rock que le premier, Izïa prouve avec sa prestation du samedi soir sur la scène Cascade, que le talent n’est pas héréditaire. Mais force est de constater qu’elle envoie du lourd sur scène. Une bête de scène qui n’hésite pas à fendre la foule et à se hisser sur les épaules de son public. Show must go on !
Un retour triomphal pour la dernière danse
C’était l’un des retours les plus attendus de cette 18e édition. Annoncé depuis plusieurs mois comme la tête d’affiche de cette dernière soirée du festival, Stromae a effectué un retour triomphal en livrant un show de 90 minutes qui a enchanté tout le monde. Neuf ans après le succès de Racine carrée, son opus de tous les records écoulé à plus de 4 millions d’exemplaires à travers le monde, le chanteur et compositeur belge a signé son retour sur scène cette année pour défendre son 3e album Multitudes. Un projet plus sombre et moins dansant que le précédent, mais dont le rendu sur scène ne laisse pas indifférent. Alors on danse sur le nouveau Stromae en rendant hommage aux invisibles de la société, mais sans oublier de convoquer ses anciens tubes comme celui qui l’a révélé en 2009 et qui fait toujours autant danser le public 13 ans plus tard. Le génie reste « Invaincu » dans sa catégorie et comme dirait le petit garçon sur les épaules de son papa en fin de concert, « c’était formidable ! »

Bien avant le passage de la tempête Stromae à 22h, notre journée a débuté sur les chapeaux de roue. On a loupé les 3/4 du concert du duo féminin Ottis Cœur programmé peu avant 14h sur la scène du Bosquet. Nous qui rêvions de faire « Coeur à corps » avec elles sur des riffs bien nerveux, c’est loupé pour cette fois, mais ce n’est que partie remise. Sur la grande scène en fin d’après-midi, nous sommes passés par plusieurs émotions. On s’est pris une claque avec le show d’Aurora avant d’assister à la performance mitigée du groupe Australien Parcels.

Peu avant la tombée de la nuit sur le domaine, les amoureux de danse Music avaient rendez-vous devant la scène Bosquet pour l’un des shows les plus dansants de cette édition, offert par le californien Channel tres. Accompagné de quatre talentueux danseurs, l’américain qu’on n’avait pas revu depuis La Magnifique Society en 2019, n’a rien perdu de sa fougue. Son mélange des genres musicaux qui place la danse au cœur de sa prestation fait toujours de l’effet sur le public avec son ambiance de club house. On en ressort trempés de sueurs, assez pour ne pas regretter de ne pas vivre pareille sensation lors du final sur la grande scène deux heures plus tard.

Le rock a fait son retour à Rock en Seine durant cette édition historique et c’est tellement mieux. Les amoureux de rock ont eu l’impression d’assister à un retour aux sources, après quelques années où la programmation s’alignait sur la mode du moment. Mis à part l’installation d’une fosse VIP qui a un peu gâché la fête, le festival s’en sort plutôt pas mal pour son grand retour et saura apprendre de ses erreurs pour rendre les éditions à venir encore plus Rock !