Deux mois après la sortie de son single Mauvaise étoile, nous avons souhaité rencontrer Izae, pour revenir sur l’année écoulée, et en apprendre un peu plus sur la sortie future de son premier EP.

Izae a fait son entrée sur les pages de notre webzine au mois de mai 2019, il avait alors séduit la rédaction en première partie de Hoshi à l’Olympia. Surnommé « Little Bowie » depuis lors, l’artiste est maintenant bien installé chez nous puisqu’il fait partie de nos coups de cœur pour les années 2019 et 2020, rien de moins.

Arrivée dans l’équipe courant 2020, j’ai personnellement découvert Izae avec la sortie, en novembre dernier, de son nouveau single Mauvaise Étoile. Cette chanson résonne en moi avec un telle intensité que je brûlais d’envie d’en parler de vive voix avec son créateur. Quelle joie de partager avec vous aujourd’hui, le résultat de ce très beau moment de discussion.

Izae, c’est un nom de scène que tu t’es choisi ? Est-ce un surnom utilisé par ton entourage dans la vie de tous les jours ?

Certaines personnes que j’ai rencontrées dans le cadre de la musique, les amis que j’ai dans le milieu de la musique m’appellent Izae. Mais mes proches, ma famille, mes amis de longue date, m’appellent Théo, qui est mon prénom.

Y a-t-il une histoire autour du choix de ce nom ?

Je cherchais quelque chose de court, qui n’existe pas forcément. Je l’ai choisi principalement pour les sonorités : le mélange du « A » et du « E ». J’aime aussi l’aspect graphique de ce mot. J’avoue, je n’ai pas tellement d’explication mystique à donner derrière ça. Je peux toujours dire que je me suis promené au clair de lune dans la forêt et qu’un loup est venu me porter un message, mais non, malheureusement (rires)!

Comment fait-on pour garder le moral en période de pandémie, en 2020, quand on est un artiste émergent qui avait de grands projets musicaux pour cette année-là ?

Ça n’a pas été si simple, effectivement, car j’avais vraiment beaucoup de projets à concrétiser au moment où la pandémie a débuté. J’ai eu la chance, pendant le premier confinement, de faire une rencontre virtuelle avec un artiste que j’admirais depuis longtemps : John Cameron Mitchell, le réalisateur du film Hedwig and the Angry Inch, dans lequel il tient le rôle principal (NDLR une comédie musicale mettant en scène Hedwig, une vedette de rock transgenre, leader d’un groupe appelé The Angry Inch). Pendant les mois de mars-avril, tous les deux jours à peu près, je postais une reprise d’un titre que je me réappropriais complètement. J’ai interprété une des chansons de ce film, John est tombé dessus et m’a contacté par message, puis on s’est mis à discuter en visio, et faire un peu de musique ensemble, mais sans arrière pensée d’en faire un projet. Ensuite, une idée d’album a vu le jour : New American Dream, un projet participatif en vue de récolter des fonds pour plusieurs associations en rapport avec la crise actuelle. Nous avons co-composé deux titres sur ce projet : Sophia et Picaflor. Sur cette dernière chanson, on chante en duo. Ça m’a beaucoup aidé à garder la tête hors de l’eau, un tel projet avec un artiste que je pensais intouchable. C’était assez incroyable ! Ce qui m’aide à aller de l’avant, c’est de trouver de nouveaux projets, toujours essayer de me réinventer.

En janvier 2020, tu as fait un voyage en Californie avec ta manageuse Charlee Da Tos, avait-il un but professionnel ?

Il n’y avait pas vraiment de but professionnel, mais à Los Angeles, malgré la politique extrême de Trump, on a ressenti, tous les deux, que c’était la ville des possibles, on voudrait vraiment y retourner pour travailler le côté professionnel. Puis cette collaboration avec John Cameron Mitchell nous donne une vraie raison de retourner aux États-Unis. Si tout se passe bien, on devrait le rencontrer réellement à l’automne prochain. On aimerait voir ce qu’il peut se passer pour nous de l’autre côté de l’Atlantique. Peut-être des concerts, et pourquoi pas, tenter un peu le cinéma. Je n’y avais jamais pensé jusqu’à l’an dernier lorsqu’on m’a proposé un rôle dans un film (NDLR Ocelot, qui n’est pas encore sorti, réalisé par Bernardo de Jeurissen ). Et du coup, ça m’a ouvert une fenêtre sur un autre domaine artistique qui m’a beaucoup plu.

Sur ton compte Instagram, on peut voir plusieurs photos de toi en tant que modèle également…

Je me suis retrouvé dans des photoshoots plus ou moins professionnels, mais souvent amateurs. Il y a quelques années, j’ai eu l’occasion de poser pour Pierre et Gilles. C’était un grand rêve, car j’ai le souvenir, très jeune, d’avoir regardé leurs photos. Ils photographiaient beaucoup de célébrités, et j’ai toujours adoré leur esthétique. Ce photoshoot avec Pierre et Gilles, ça a été assez exceptionnel pour moi. Je fais aussi moi-même de la photo, c’est un à-côté qui n’est clairement pas mon activité principale.

(c) : Julien Calvin Dumas

Revenons sur les reprises que tu as faites pendant le premier confinement : les mises en scène étaient vraiment soignées. Je ne sais pas où tu étais confiné, mais le cadre était vraiment sympa !

J’étais confiné chez ma mère à Toulouse. L’appartement était grand mais pas extensible. Je m’étais fixé comme objectif de proposer des reprises tous les deux jours, mais au bout d’un moment, quand toutes les prises de vues ont été utilisées, c’était un peu compliqué de se renouveler. Donc, sur certaines vidéos, on a essayé de soigner un peu la mise en scène, et puis sur d’autres, c’était moins évident.

Je trouve ça bien, justement, certaines reprises étaient plus épurées, et d’autres plus mises en scène. Tu t’es bien diversifié, la mise en scène n’est pas nécessaire sur certains morceaux. As-tu l’impression que cet exercice t’ait donné un coup de pouce pour ta visibilité sur les réseaux sociaux?

Les gens étaient très connectés à ce moment-là, et, de mon côté, je n’avais pas eu tellement l’habitude de montrer autant de facettes différentes. Les gens ont beaucoup partagé, ça m’a permis de me faire connaître, et John Cameron Mitchell a partagé une de mes reprises, beaucoup d’américains sont venus me suivre après ça.

As-tu eu d’autres retours d’artistes que tu as repris ?

J’y ai réfléchi après, mais j’ai repris beaucoup d’artistes non contemporains, en fait.

Je trouve ta reprise de 3e sexe d’Indochine vraiment très réussie, et particulièrement originale, très personnelle, tu n’as pas eu de retour de leur part ?

Je pense qu’ils ne sont pas tellement connectés. J’ai tourné dans un clip d’Indochine quand j’avais 16 ans, et j’aimerais beaucoup reprendre contact avec eux aujourd’hui, parce que je pense qu’il pourrait y avoir une belle entente artistique. Je trouverais très intéressant de discuter avec eux. Ils défendent beaucoup de choses que je soutiens aussi, ils ont mis sur la table des sujets importants. Dans les quelques interviews de Nicolas Sirkis que j’ai pu voir, je l’ai trouvé souvent assez juste.

Quelle est la place des réseaux sociaux dans la communication d’un artiste aujourd’hui? Comment vis-tu et gères-tu ça ? Ressens-tu une obligation de connexion au moins une fois par 24h, pour ne pas louper de story ? Ça peut être pesant parfois ?

C’est évidemment hyper important pour un artiste qui débute sa carrière, d’être présent sur les réseaux sociaux, pour garder contact avec tous les gens qui soutiennent le projet. J’essaie de répondre un maximum aux messages, ce que je trouve normal, car recevoir des retours positifs me booste beaucoup. Il est vrai qu’il m’arrive parfois de louper quelque chose, j’espère que les gens ne m’en tiennent pas rigueur, mais c’est aussi le jeu des réseaux. Je me suis un peu déconnecté cet été. Je ne me sens pas prisonnier, dans le sens où je n’ai peut-être même pas assez le réflexe de poster des choses sur ma vie perso. Parfois, je fais des choses qui, j’imagine, pourraient intéresser les gens, mais je ne pense même pas à les partager sur Instagram.

Ce n’est pas trop compliqué de gérer l’équilibre entre ta vie privée et le fait d’être une personnalité publique ?

Les réseaux sociaux donnent parfois aux gens qui nous suivent, la sensation d’être très proches de nous, alors qu’on ne les connaît pas dans la réalité, ils pensent qu’on est ami, et du coup, les limites ne sont pas très nettes et il a pu m’arriver, évidemment, d’avoir des messages pas désirés, pas très corrects ou des questions hyper perso auxquelles je n’ai pas forcément envie de répondre. Mais les réseaux sociaux sont aussi un moyen fabuleux de faire de belles rencontres, d’avoir des retours sur ma musique et mes clips et d’ouvrir la porte à des collaborations artistiques. J’apprécie énormément cet aspect qui me nourrit en tant qu’artiste !

Hôtel de Ville (c) : Alan Marty

Quand a eu lieu ton dernier concert ?

Mon dernier concert, c’était aux Trois Baudets à Paris, fin septembre 2019, le 27 il me semble. Ça y est, ça fait un an et des poussières…

Sur scène, vous êtes deux, avec Emmanuel Delpix, ça se passe toujours comme ça ?

Pour l’instant, on n’a évidemment pas la tête à fond dans la préparation des live, mais on est en train de réfléchir à un set où je serais seul, avec plusieurs instruments. Si je m’accompagne à la guitare, au piano, ou autre, il me faut une base rythmique derrière, il faut qu’on le tente pour voir si on peut créer vraiment un aspect live. J’aime bien aussi m’occuper de la mise en scène, des images, de l’esthétique globale. En première partie de Julien Doré, j’étais seul sur scène, cela dit, c’était en acoustique. C’est sûr, ça ajoute une pression supplémentaire, mais je pense que c’est aussi une force, et cela apporte une simplicité de déplacement pour les concerts.

La sortie d’un EP était prévue pour fin 2020, qu’en est-il exactement ?

Effectivement, on avait tablé sur fin 2020. Ce qui est sûr, c’est qu’il sortira en 2021. On prend quelques semaines, là, avec Charlee, ma manageuse, pour rencontrer certaines personnes dans des labels, qu’on doit voir depuis longtemps, et on espère rencontrer un directeur artistique qui comprenne vraiment le projet, qui ait envie et qui y croie, parce qu’on n’a pas envie de juste être en label pour dire qu’on a un label. Si on ne trouve pas la bonne personne, on sortira l’EP en autoproduction. Il y a déjà pas mal de monde autour de nous, qui est prêt à s’investir sur le projet, c’est très précieux d’arriver à créer des collaborations où tout le monde est content, où tout le monde y trouve son compte.

Il y a aussi pas mal de labels indépendants, c’est peut-être ce que vous recherchez ?

En fait, je pense que ça dépendra de la personne, du directeur artistique. Parce que ma musique est très pop, parfois trop pop pour tout ce qui est musique indé, et, à la fois, trop indé pour tout ce qui est industrie de la pop. Je pense que ça fait sa force, mais c’est aussi parfois compliqué à comprendre pour l’industrie musicale. J’aime voir ma musique comme un croisement entre Étienne Daho et Troye Sivan.

Ton dernier single en date, « Mauvaise étoile », est sorti le 27 novembre dernier…

Cette chanson, je l’ai composée il y a un an et demi, deux ans, et quand le premier confinement est arrivé, tout à coup, elle avait une résonance vraiment particulière. Je l’avais de toute façon écrite pour parler un peu de l’état du monde, mais après le premier confinement, je me suis dit « c’est dingue ce qu’elle peut résonner aujourd’hui » et c’est pour ça que j’ai voulu la sortir.

J’aime beaucoup, dans cette chanson, l’alternance de mots assez durs avec des mots plus doux, qui appellent à la sérénité. La formule « pourvu qu’on sache tomber » est vraiment très belle. C’est quand même une chanson qui parle d’apocalypse, c’est l’acceptation de l’horreur. Elle donne envie d’être serein et de laisser venir les choses, parce que, de toute façon, tu ne peux pas changer ces choses-là. Il faut les accepter, on n’a pas le choix.

C’est toujours libre d’interprétation, évidemment, mais c’est exactement comme ça que j’ai voulu l’écrire, donc je suis heureux si l’émotion que j’ai voulu faire passer fonctionne. Ce n’est pas une chanson de bataille, qui dit « on va gagner », c’est juste une chanson qui constate l’état du monde et dans quel état d’esprit on se peut se mettre pour… pour la fin du monde. Je peux être assez pudique sur mes sentiments dans la vie, Mauvaise étoile est un peu une chanson thérapie, parce que j’ai une peur viscérale de la mort, de l’aspect apocalyptique, de « où va-t-on ? », « que fait-on ? », c’est un exutoire.

Cette chanson Mauvaise étoile sera-t-elle sur l’EP ?

J’ai eu besoin de la sortir à cette période-ci et c’est un peu comme si elle appartenait, maintenant, à ce contexte précis, même si je pense continuer à la faire vivre, notamment en live, évidemment. L’idée avec l’EP, c’est de passer à la suite, avec des chansons qui ne sont pas encore parues. On est en production, en ce moment, avec un arrangeur, mais on n’a pas un choix arrêté. On est parti sur un EP six titres. L’idée est de ne pas sortir un album tout de suite, donc, il faut faire une sélection, et puis se dire que les autres chansons seront sur l’album par la suite. Je ne pense pas que Mauvaise étoile sera sur l’EP, mais ce n’est pas définitif.

Sur YouTube, on peut écouter cette chanson que j’adore : « Minuit FM » en version acoustique, sera-t-elle sur ton EP à paraître ?

Effectivement, parmi les chansons disponibles sur YouTube, mais pas sur les plateformes, c’est la seule qui sera sur l’EP. Pour l’instant, on peut l’écouter en piano-voix, on l’a réarrangée en version radio pour l’occasion.

Nous attendons la sortie de ton EP avec impatience, et continuerons à te suivre attentivement. À bientôt !

Plus d’infos

Mauvaise Etoile, le nouveau single d’Izae est disponible sur toutes les plateformes.

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